Bienvenue-dans-le-meilleur-des-mondes.com... - chronique de la troisième et dernière journée du CIES

La mèche de cheveux rebelle fougueusement rejetée vers l'arrière. Le geste compulsif qui ponctuait les cours enflammés du philosophe Jankélévitch à la Sorbonne a fait sourire trois générations d'étudiants.
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En ce troisième et dernier jour du Forum du CIES, à Shanghai, Maurice Lévy, le président de l'agence de Publicis, a le cheveu sage et c'est en termes posés qu'il en appelle au penseur de l'inachevé pour annoncer à son auditoire que « la révolution technologique permet d'ajouter ce je-ne-sais-quoi d'amour et d'émotion » dans la relation entre les marques et les consommateurs. Maurice Lévy connaît aussi son Friedman, ce journaliste américain qui a convaincu le monde que désormais, la terre est plate. « Le temps s'accélère et les distances s'effacent, constate le publicitaire, les catégories et les pouvoirs sont mouvants. Le nouveau monde est celui où les contraires coexistent dans l'harmonie. Ce n'est plus le monde du « ou », mais un monde de « et ». »

M Levy - Publicis
Le patron de Publicis aurait-il lu aussi Wittgenstein ? Provocateur tranquille, il conclut que ce monde-là s'annonce, plus exactement s'ouvre comme le meilleur des mondes, le « brave new world ». Pour les étudiants de Jankélévitch et, plus tard, leurs enfants, ce roman d'anticipation a sonné comme une alarme contre la technologie et la société aseptisée que nous réservait le progrès scientifique. Mais Huxley n'avait pas prévu ce détail : le point.com, capable d'inverser les pouvoirs. « A un consommateur nourri de nouvelles technologies, on ne peut plus imposer les choses, avance Maurice Lévy. Avec ce consommateur-là, il faut collaborer. »


Le patron de Publicis aurait-il lu aussi Wittgenstein ? Provocateur tranquille, il conclut que ce monde-là s'annonce, plus exactement s'ouvre comme le meilleur des mondes, le « brave new world ». Pour les étudiants de Jankélévitch et, plus tard, leurs enfants, ce roman d'anticipation a sonné comme une alarme contre la technologie et la société aseptisée que nous réservait le progrès scientifique. Mais Huxley n'avait pas prévu ce détail : le point.com, capable d'inverser les pouvoirs. « A un consommateur nourri de nouvelles technologies, on ne peut plus imposer les choses, avance Maurice Lévy. Avec ce consommateur-là, il faut collaborer. »

En termes plus pragmatiques, Martin Sorrell, directeur général du leader mondial de la publicité, WPP, avait ouvert la même voie quelques instants auparavant. « Un quart de nos budgets publicitaires sont actuellement destinés aux nouveaux supports numériques, dévoile-t-il. Nous devons très rapidement arriver à un tiers. » WPP, qui a créé une filiale dédiée aux nouvelles technologies, a multiplié les acquisitions ces derniers mois pour se renforcer sur ce secteur et s'apprête à racheter Blue, une société de marketing direct basée à Singapour. A la tribune lui succède David Wei, un ancien de B&Q Chine, qui a rejoint la plate-forme virtuelle Alibaba, qui rappelle, par des exemples simples, à quel point le commerce en ligne permet de mieux acheter et de mieux vendre. « Au client qui a acheté un rasoir sur Internet, on peut proposer ensuite des produits d'après-rasage. Une enseigne physique ne pourra jamais faire ça. »

Une terre aplatie ignore les frontières physiques et géographiques. Ce sont les revenus de ses habitants et leur niveau de vie qui en tracent les territoires. Donc en excluent encore des centaines de millions d'Africains, de Chinois ou d'Indiens.

G Kapur - Reliance Retail
Quoique. Entré en distribution moderne de fraîche date, le groupe indien Reliance Retail prend beaucoup de précaution pour s'intégrer dans le tissu économique d'un pays dont la classe moyenne ne dépasse guère 20 % de la population. « Pourtant, raconte Gunender Kapur, PDG de la division Food Business, dans la majorité des cas, les mariages qui ont lieu dans en Inde ont été arrangés via Internet. » A des consommateurs « connectés, qui savent tout ce qui se fait ailleurs, nous devons offrir le même niveau d'innovation et de qualité ». Reliance ne veut pas renoncer pour autant à ce qu'il appelle sa « politique d'inclusion » : un développement de la grande distribution qui préserve le petit commerce (via le cash-and-carry) et qui, surtout, fasse prospérer les immenses populations rurales.


Wal-Mart, dont on attend le premier magasin en Inde pour les prochains mois, revendique des objectifs aussi louables. « Au fond, notre mission, proclame Mike Duke, vice-président de la première entreprise mondiale, c'est d'aider les gens à économiser de l'argent pour pouvoir vivre mieux. » Pour le distributeur américain, cette société-là est la meilleure possible et Mike Duke marche volontiers dans les pas de Hu Jintao. « Le gouvernement chinois s'est donné pour objectif l'avènement d'une société harmonieuse et de prospérité durable, souligne-t-il, et notre secteur a un rôle primordial à jouer dans ce sens, en Chine comme dans tous les pays où nous nous implantons. En ce sens, nous sommes les partenaires des communautés du monde entier. »

Et comme à Wal-Mart rien n'est impossible, Mike Duke n'hésite pas à inclure, dans ce partenariat, les 1,9 million d'employés du groupe, « enthousiastes et heureux de profiter de l'échelle sociale que nous leur apportons. » Mieux (ou pire) : il le prouve. Déboulent sur la tribune du Forum une quarantaine d'employés chinois du groupe, moitié filles moitié garçons confondus dans les mêmes jeans et polo rouge réglementaires. Et d'entamer un cri de guerre à faire froid dans le dos, dans une martiale attitude qui ferait passer les défilés prolétaires au plus fort de la Révolution culturelle pour de débonnaires kermesses de sous-préfecture. Dans une terre toute plate, la vie réelle réserve aussi des raccourcis de cette nature. Euh... c'est où la bibliothèque sur Second Life ?

Francis Lecompte à Shanghai

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