Ce qu’il faut savoir sur Costco avant son arrivée

Le modèle de l’américain Costco est si inhabituel que les futurs fournisseurs ont beaucoup à apprendre de son fonctionnement. Sous l’égide de LSA, le patron de Costco France et les deux acheteurs alimentaire et non-alimentaire ont expliqué la méthode à une centaine d’industriels.

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Les images viennent du dernier « club-entrepôt » Costco ouvert en mai à Séville, en Espagne. Des dizaines de cartons de boîtes de truffes au chocolat sont disposées sur une quinzaine de mètres dans une allée pénétrante du magasin. Elles montrent à quelle vitesse – quarante-cinq minutes précisément – les clients vident l’énorme stock mis en vente. Même si les images ont été accélérées, elles résument parfaitement le modèle Costco : vendre en gros, très vite et en très grosses quantités un nombre de références très limité, réparties à parts égales entre alimentaire et non alimentaire. C’est ce modèle qui a fait le succès des magasins partout dans le monde. Le premier à ouvrir en France ressemblera à celui de Séville, inauguré le 15 mai. Situé à Villebon, dans le sud de la région parisienne, il est attendu pour novembre 2015 et devrait être suivi d’une quinzaine d’autres dans les dix années à venir, dont quatre à six en Ile-de-France. On en compte déjà 26 au Royaume-Uni.

Les dirigeants du groupe américain sont à pied d’œuvre sont à pied d’œuvre pour trouver les bons fournisseurs et les bonnes catégories de produits à proposer dans l’entrepôt français. Le patron de Costco France, Gary Swindells, un Canadien à l’accent bien prononcé, est venu, accompagné de deux acheteurs alimentaire et non-alimentaire, expliquer le modèle devant une centaine de fournisseurs potentiels, lors d’une matinée organisée par LSA. Dans ce magasin, il n’y aura pas de place pour tout le monde, le nombre de fournisseurs est restreint. Chacun d’eux est unique dans sa catégorie. Il n’a pas de concurrent. Mais l’offre doit être ultracompétitive. C’est-à-dire se vendre en très grandes quantités et au meilleur prix. « Chez nous, on ne proposera qu’un modèle de vélo pour homme, femme et enfant, de la meilleure marque, au plus bas prix. Nous sommes un grossiste. Si on veut un plus grand choix, ce n’est pas chez nous qu’il faut venir, il faut aller chez Decathlon. »

75 millions de membres dans le monde

Ce business model du « club-entrepôt » a fait ses preuves. Costco est le deuxième – ou troisième selon l’année – distributeur mondial derrière Walmart, avec une capitalisation boursière de 51 milliards de dollars, pour 663 magasins. L’enseigne se situe à mi-chemin entre Metro et Auchan, sauf que la moitié du chiffre d’affaires est réalisé avec des produits non alimentaires. Elle s’adresse autant aux particuliers qu’aux revendeurs (épiciers, restaurateurs…). Les membres du « club » – 75 millions dans le monde – paient une carte annuelle, d’environ 40 €, renouvelable chaque année, pour accéder au magasin. Sur ces bases, Costco enregistre 2,3 millions de transactions par jour !

« Au départ, Costco n’était pas une entreprise mondiale, souligne Georges Ferronnière, directeur Europe chez Nielsen. Elle l’est devenue parce qu’elle a eu du succès, et les chiffres sont impressionnants : 100 000 membres par entrepôt, 60 000 foyers, 100 € de ticket moyen et 3 500 tickets par jour et par entrepôt ! Mieux, le chiffre d’affaires croît systématiquement plus vite que le nombre de magasins. » C’est l’inverse chez la plupart des distributeurs…

Les « membres » viennent là pour acheter des lots de produits d’une référence, ou alors une télé, un robot ménager, des surgelés, des yaourts, de la viande, des poulets… Tout ou presque est présenté sur palettes, dans des cartons de suremballage très soignés. Car Costco n’est pas un magasin de hard-discount, loin de là. Il ne vend que des produits de qualité et souvent de grande marque. Ce sont les coûts réduits et les rotations géantes qui permettent au magasin de casser les prix sur des montres Rolex, des diamants, des scooters Piaggio ou les fameuses truffes au chocolat !

D’abord, les volumes de vente

« Nous mettons l’accent sur les coûts d’exploitation. Le petit nombre de références nous permet d’avoir une très bonne gestion des stocks. Tout est basé sur le volume de vente, c’est pourquoi il est important d’avoir des produits qui “ performent ”. La forte rotation des produits frais permet aussi de limiter les pertes. » D’ailleurs, pour Gary Swindells, les fournisseurs doivent aussi s’y retrouver. « Nous avons chez Costco des fournisseurs depuis plus de vingt ans ! Nos dépenses d’exploitation sont peu élevées, la masse salariale est limitée à 4 ou 5%. On ne fait pas de publicité sur les produits ni sur les prix, pas de banderoles dans le magasin, pas de flyers chaque semaine. Et le plus important chez nous, c’est d’éviter les ruptures. » C’est à partir de ce modèle de coûts contenus copartagés avec les fournisseurs que ceux-là peuvent trouver un prix rentable pour eux aussi. On n’imagine d’ailleurs pas les multinationales venir chez Costco pour perdre de l’argent.

Des scaphandres à l’optique

Quelque 3 500 références sont « fixes » et figurent dans le rayon permanent. Mais il y a aussi la fameuse « chasse au trésor », qui fait de Costco l’enseigne qui bénéficie le plus du bouche-à-oreille. L’an dernier, aux États-Unis, le leader du cash & carry a vendu 396 000 voitures ! « Mais aussi des scaphandres, des pianos à queue, des bateaux, des spas… On propose également des produits de consommation courante sur 12 palettes au sol, en conditionnement exclusif. » Comme des shampooings, de la literie, de la vaisselle, des produits d’entretien. Enfin, Costco développe également aussi beaucoup la vente de lunettes – c’est le premier vendeur d’optique outre-Atlantique. Un espace est dédié à cette activité dans le magasin. Ou encore des pneus, que l’enseigne vend chaque année en quantités astronomiques, y compris des Michelin.

Quels fournisseurs vont participer à la fête Costco en France ? Globalement, 75% de l’offre sont déjà pourvus, prévient Gary Swindells. En non-alimentaire, les multinationales ont dès à présent des relations avec l’enseigne, comme L’Oréal, qui y présente des références exclusives. C’est plutôt dans l’offre alimentaire que Costco cherche à peaufiner sa gamme, dans les fruits et légumes, les viandes, la charcuterie, y compris avec de très petits fournisseurs locaux. L’objectif, une fois encore, est d’offrir la meilleure qualité de fraîcheur au meilleur prix. « Nous achetons déjà pour 800 millions de dollars de produits en France pour l’international, la gastronomie française est très recherchée partout dans le monde », précise Gary Swindells. Les dirigeants de Costco devaient aussi arpenter les allées du Sial pour trouver les fournisseurs prêts à se jeter dans l’aventure.

Et après l’entrepôt de Villebon, un autre projet d’installation va être annoncé dans les prochains mois, probablement dans la région parisienne, pour une ouverture en 2016. Dés lors, sera créée une centrale d’achats permanente en France, et la véritable expansion de l’enseigne pourra démarrer.

« Nous ne sommes pas un concurrent direct des hypers »

Costco rencontrera-t-il le succès en France, où beaucoup d’enseignes étrangères ont fini par plier bagage ou souffrent, comme les hard-discounters allemands ? Gary Swindells en est persuadé. « Costco est un modèle novateur. Il surprend partout où nous nous installons. Nous avons la qualité et les prix : c’est ce que tout le monde recherche. Nous ne sommes pas vraiment un concurrent direct d’une autre enseigne d’hypermarchés ou même de Metro. Ils excellent dans leur domaine, mais ce qu’on offre est totalement différent. Si on vient chez Costco pour acheter de la moutarde de Dijon, il n’y aura qu’une référence et, dans le conditionnement dans lequel elle est vendue, elle sera au meilleur prix possible. C’est pourquoi nous devons faire une présélection des produits de très grande qualité et nous assurer que ces produits vont pouvoir se vendre en très gros volumes. À chaque fois, on nous interroge sur la concurrence, mais ce modèle n’est pas comparable. Nous ne sommes pas en frontal avec des magasins détaillants. »

Le « buzz » rentable de la « chasse au trésor »

La chasse au trésor, c’est ce qui alimente le « buzz » chez Costco. Ici un sac de golf avec tous les fers, là, une raquette de tennis, mais aussi des scooters Piaggio, des téléviseurs de marque, des diamants… Bref, haute qualité à très bas prix, via une seule référence. « Nous créons des événements spéciaux, et c’est l’occasion pour les fournisseurs de montrer la valeur de leurs produits, comme de la bière, des truffes au chocolat ou des articles très atypiques », indique Gary Swindells, directeur général de Costco France. Il y a ainsi des road shows sur les maillots de sport, des saunas, des jacuzzis, des robes de mariée, « des produits qui font le buzz »… « Nous avons même vendu des cercueils. Les clients devaient être satisfaits, nous n’avons eu aucun retour ! » (Sic) Les ventes de la chasse au trésor, sur environ 500 références, sont si bien rodées qu’elles servent non seulement à alimenter le chiffre d’affaires, mais aussi à faire la pub de Costco, le groupe n’en faisant pas… Aux États-Unis, le buzz autour de l’enseigne serait deux fois plus important que pour les concurrents.

 

 

Costco en France, en Europe et dans le monde

1 club-entrepôt à Villebon (91) prévu fin 2015

1 magasin en Espagne (2014), 26 au Royaume-Uni, 468 magasins aux États-Unis, 88 au Canada, 33 au Mexique, 20 au Japon, 11 en Corée, 10 à Taïwan, 6 en Australie

Numéro 2 mondial 110 Mrds $ de CA, 51 Mrds $ de capitalisation boursière 194 000 salariés

 

Source : Costco

 

13 550 m2

de surface moyenne d’un club entrepôt

 

 

170 M €

de CA par club entrepôt

 

 

1

référence par catégorie

 

 

2000

références

 

 

130 $

de panier moyen lors du passage en caisse

 

 

500

références à très haute rotation, façon « vente flash »

 

 

L'avis de Marc Chapados

directeur des achats non alimentaires

« Nous recherchons des produits exclusifs, à très forte rotation »

 

« Ce que nous aimons, ce sont les catégories « vite entrées et vite sorties », en cherchant le plus court délai possible, en évitant les ruptures de stock. L’offre est présentée sur palettes pour éviter les manutentions et faire des économies sur les coûts de transport. Le marchandisage « 360° » doit être soigné, simple et efficace. Nous cherchons des produits exclusifs avec les industriels afin de maximiser la valeur, comme des rasoirs Philips avec trousse de voyage, des lots de brosses à dents, de lampes de poche… Les principales catégories sont la santé-beauté, les pneus, les lunettes et verres de contact, les prothèses auditives, avec un corner dédié, les accessoires automobiles, la literie, les bijoux – Costco a vendu 110 000 carats de diamant l’an dernier –, le bricolage, les articles de bureau, de sports et loisirs, l’électroménager et l’électronique. Le saisonnier a aussi sa place, avec, par exemple, une massification de glacières juste avant l’été ou une offre de meubles de jardin… »

 

 

Le club-entrepôt, un concept imaginé pour des ventes massives

Des magasins-entrepôts d’environ 13 500 m2, avec un nombre de références très limité (4 000), pour moitié alimentaires et non-alimentaires, afin que chaque référence ait un étalage correspondant aux ventes de la plus forte journée de la semaine. À l’entrée, l’électronique et l’électroménager. Dans chaque allée se trouvent, à gauche, le non-alimentaire et, à droite, l’alimentaire « sec ». Au fond, les armoires de surgelés, les produits frais, la boucherie, la poissonnerie. Inhabituel en France, l’optique : Costco est le plus grand vendeur de lunettes et d’audioprothèses aux États-Unis. L’offre « fond de rayon » est tout de même renouvelée une ou deux fois par an, même s’il ne s’agit que du changement de conditionnement ; 500 références nouvelles entrent, et autant en sortent.

 

Nous ne cherchons pas le plus bas prix, mais le meilleur rapport qualité/prix/rotation, dans un partenariat de long terme avec nos fournisseurs sur une référence unique.

Gary Swindells, DG de Costco France

 

L'avis de Jean-Yves Mocquet

directeur des achats alimentaires

« Nous travaillons aussi avec des TPE pour l’offre locale »

« Outre le prix, le conditionnement est très important pour nous, il doit communiquer la valeur qu’il représente tout de suite à nos membres (les clients). Une de nos fiertés, c’est l’offre de produits du terroir de France, avec des goûts connus dans le monde entier. Nous vendons déjà beaucoup de « made in France » partout dans le monde, du fromage, de la confiture, du vin… pour environ 670 M € de CA. Nous voulons nous appuyer sur cette réputation de qualité gastronomique, dans la boulangerie, les fruits et légumes, les viandes, l’épicerie, la confiserie, les boissons gazeuses, les surgelés, la charcuterie et les fromages, les vins et spiritueux. Nous sommes très attentifs à la fraîcheur des produits, à l’offre locale. Notre modèle de rotation rapide s’y prête. On fait beaucoup de choses avec de petites entreprises, comme des maraîchers, avec des moyennes entreprises pour des plats préparés, ou avec des grandes, sur une référence très spécifique. Nous avons aussi vendu 79 millions de poulets rôtis l’an dernier ! »

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