Consommation : tout va bien... [Edito de la semaine]
Jusqu’ici, tout va bien. Tel pourrait être le bilan de ce premier semestre 2015 pour la consommation. Car, n’en déplaise aux apôtres du déclin, les indicateurs n’ont pas tous viré au rouge. Alors pourquoi diable ce pessimisme ambiant règne-t-il comme une pensée unique ? Pourquoi bon nombre de fédérations ou d’acteurs sonnent-ils perpétuellement la sonnette d’alarme en annonçant que le pire est devant nous ?
Il faut d’abord reconnaître que ces incorrigibles pessimistes ne manquent pas d’arguments. Là où certains se réjouissent de la hausse du pouvoir d’achat, ils répliquent qu’elle ne s’explique que par la baisse du prix du pétrole. Là où certains se satisfont d’une progression de 1 % des ventes alimentaires, ils rétorquent que la natalité explique en priorité ce léger rebond. Là où certains imaginent que la baisse des taux d’intérêt va pousser certains Français à investir dans le logement, ils mettent en avant le recul des prestations sociales pour les catégories intermédiaires. Finalement, de leur point de vue, les optimistes s’apparentent à cet homme qui tombe d’un gratte-ciel et, devant les fenêtres de chaque étage, se dit que « jusqu’ici, tout va bien. » Et, in fine, la question est bien là. Faut-il se réjouir de la relative bonne tenue de la consommation ou, bien au contraire, faut-il s’en inquiéter ? Car, au-delà des ventes, en volume comme en valeur, et des éventuels gains en part de marché, la question de la rentabilité des entreprises est cruciale. Or, dans l’alimentaire comme dans le non-alimentaire, chez les industriels comme chez les distributeurs, tout est mis en place pour faire tenir les ventes. La pression promotionnelle est plus forte que jamais. La guerre des prix ne cesse de s’intensifier. Résultat, si les ventes résistent, on ne peut pas en dire de même des marges. À force de brûler du carburant, la panne sèche est à craindre, et il ne faut pas perdre de vue que les marges d’aujourd’hui sont les investissements de demain et la croissance du futur. Si les entrepreneurs ne reprennent pas confiance, s’ils ne décident pas avec force et conviction qu’il est plus que jamais nécessaire de lancer de nouvelles références, d’ouvrir des usines plus modernes ou de rénover les magasins, la sortie de crise n’en sera que plus longue.
Certes, il est logique de s’inquiéter de « l’uberisation » de la société, et donc de notre économie. Tant les règles du jeu changent et tant de nouveaux entrants bouleversent tout sur leur passage. Mais la transformation digitale n’est pas réservée aux start-up. Quant aux gains de productivité générés par ces nouveaux outils (big data, cloud, drones…), ils ne font que commencer. Si rien n’est fait, la chute du gratte-ciel sera mortelle. Dans le cas contraire, on s’apercevra vite qu’il ne s’agit en rien d’un immeuble, mais d’un simple trampoline. Et dans ce cas-là, l’atterrissage sera immédiatement suivi d’un… rebond. Et avec le sourire.