Gros électroménager : Le connecté, une opportunité pour le Gem
Et si, après avoir vanté les vertus techniques des appareils, il convenait de passer à un autre discours, pour redynamiser le secteur ? ça tombe bien : les gammes 2.0 aident en cela.
« On arrive un peu au bout du discours uniquement basé sur les caractéristiques techniques », affirme Cédric Bellat, senior category manager chez Whirlpool. Et comme la nature a horreur du vide, il plaide pour laisser la place aux appareils connectés, à l’instar de ceux de la gamme 6e Sens Live, lancée par le fabricant en ce mois d’octobre. Un développement né d’un constat implacable : « Si le marché progresse, c’est beaucoup dû aux MDD », explique-t-il. Et si celles-là se montrent si dynamiques, c’est peut-être bien le signe d’un problème d’innovations de la part des fabricants.
Un problème, et non un manque. De démonstration. D’explication. Car le travail accompli, lui, est gigantesque. « En dix ans, les progrès techniques ont permis de consommer moitié moins d’eau et moitié moins d’énergie », avance ainsi Camille Beurdeley, déléguée générale du Groupement interprofessionnel des fabricants d’appareils d’équipement ménager (Gifam). C’est tellement vrai qu’aujourd’hui, résume Damien Chicaud, directeur de la statistique au Gifam, « plus de la moitié du marché du lavage, le plus important de la catégorie du gros électroménager, est en A++ et mieux. » On voit même fleurir du A+++. C’est dire le chemin parcouru…
Mais, s’il faut évidemment s’en réjouir – quels autres marchés peuvent se targuer de tels efforts ? –, ces avancées technologiques suffisent-elles, finalement, à susciter l’envie ? À satisfaire le consommateur ? N’est-ce pas, au contraire, désormais un prérequis ? Car, après tout, encore heureux que ma machine à laver lave efficacement et écologiquement… « Le plus embêtant est encore que cela manque surtout de concret, avance Georges Lewi, spécialiste des marques. A2+, A3+, très bien! Mais combien d’économies au final ? »
À ce stade, qu’on n’insulte pas l’intelligence des fabricants, surtout pas. « Toutes les marques ne sont pas capables de présenter du A3+ au même prix, assure Nicolas Dupuy, directeur marketing de Brandt France. C’est bien le signe qu’il y a de vraies différences à faire valoir entre les territoires de marques. »
Une notion de marque secondaire
Certes. Mais, pour autant, on continue à acheter d’abord un « réfrigérateur ». La notion de « marque » n’intervient qu’ensuite, pour valider un choix déjà bien engagé. Et comment imaginer qu’il en aille autrement avec « une petite vingtaine de marques importantes sur ces marchés ayant, pour la plupart, une approche généraliste sur l’ensemble des catégories du Gem, remarque Georges Lewi. Cela a beau être un énorme gâteau, c’est beaucoup, et, pire encore, chaque marque s’exprime sur l’ensemble des items – technique, design, énergie, etc. –, sans en privilégier un, qui serait leur angle d’attaque principal ». Sur ce constat, pas de contradicteurs. « Les marques ont bien conscience qu’un seul discours technique n’est pas suffisant », concède Camille Beurdeley. Mais, plaide-t-elle, « avec des marges faibles, comme elles le sont sur ces marchés, prendre des risques et se démarquer n’est pas facile. » Pour autant, il y a là un créneau à prendre. « 60% des renouvellements sont dus à autre chose qu’à une panne et sont liés à des événements de vie : un déménagement, une naissance… », dévoile Camille Beurdeley. C’est bien le signe qu’il y a sur le « blanc » des leviers à actionner, sans aller jusqu’à rêver y promouvoir des achats d’impulsion.
Le marché en 2014
Sources chiffres : GfK, Gifam
« La connectivité, c’est le sens de l’histoire »
En attendant, « la situation actuelle fait les beaux jours des comparateurs », avance Georges Lewi. Puisqu’il faut bien choisir, et puisque l’on ne se tourne vers ces rayons que tous les dix ans en moyenne, sans notion de tarif, va donc pour l’entrée par les prix alors. Et va donc, on y revient, pour le succès des marques propres. CQFD.
« L’enjeu est de valoriser le marché et de permettre une distinction plus franche des apports des uns et des autres, explique Camille Beurdeley. Des uns par rapport aux autres. » La connectivité semble toute désignée pour cela. Ce travail, immense, sur l’écologie et le pouvoir d’achat étant accompli, et même devenu un prérequis, on peut enfin évoquer des messages plus « positifs » : en clair, présenter des innovations qui peuvent « simplifier la vie ». « La connectivité, c’est le sens de l’histoire, à l’image de ce qu’il s’est passé dans le milieu automobile », avance Nicolas Dupuy, pour Brandt. La question n’est pas de savoir s’il faut aller vers le connecté, ni même quand… mais comment.
Les tendances
- Rares sont les marchés à avoir fait autant d’efforts « techniques » en si peu de temps. Plus de la moitié du secteur se classe en A++ et mieux aujourd’hui.
- Conséquence directe : tout se ressemble un peu et il devient difficile de faire de ce discours « énergétique » un argument de vente.
- Il convient donc de « réinventer » le discours : l’avènement des appareils connectés devrait aider en cela.