Il y a dix ans, les caisses automatiques arrivaient
En 2004, pour la première fois dans l’Hexagone, un Casinoet un Auchan installaient une caisse sur laquelle le client opérait en libre-service. Aujourd’hui, plus de 10 000 caisses automatiques sont implantées dans le commerce alimentaire.
\ 13h34
Flash-back. En cette année 2002, la grande distribution française cherche de nouvelles réponses à l’attente des clients en caisse. Besoin de moderniser, de donner un nouveau souffle à ces espaces où l’insatisfaction des clients reste vive... Les enseignes se mettent en quête de solutions. Les voyages d’études à l’étranger se multiplient.
Casino et Auchan, notamment, observent une technologie qui se répand rapidement aux États-Unis, depuis les années 90, chez Kroger et Walmart : le self-checkout (SCO), ou caisse automatique. Son but Décongestionner les files d’attente aux caisses traditionnelles. Le client qui compte une dizaine d’articles tout au plus dans son panier est orienté vers ces caisses où il scanne lui-même les produits, avant de les déposer sur une balance qui, grâce au poids, contrôle le nombre d’articles. Enfin, il règle ses achats sur l’automate.
Problèmes de lecture
Une hôtesse de caisse supervise un îlot de quatre à six caisses, accompagne le client, intervient en cas de besoin... En 2002, Marks & Spencer importe pour la première fois le self-checkout au Royaume-Uni et en Europe, en partenariat avec le fabricant américain NCR.
Le 19 mai 2004, le Casino de Chasse-sur-Rhône, en Isère, inaugure ses « caisses express », fournies par NCR. Le personnel est chargé de dénicher les consommateurs munis de paniers aux autres caisses, rapporte LSA à l’époque. Tout n’est pas idéal : les clients butent sur l’absence de codes-barres pour une soixantaine de références en fruits et légumes, payables à la pièce. « Plus généralement, en 2006, 2,4% des codes-barres rencontraient un problème en première lecture », souligne Pierre Georget, directeur général de GS1 France, garant des standards. Le risque d’abandon des achats aux SCO pousse les acteurs à respecter les standards. En 2012, le taux de non-lecture tombait à 0,4%.
Le 6 juin 2004, Auchan dégaine à son tour, dans l’hypermarché de Villeneuve-d’Ascq, dans le Nord. Quatre unités d’une « Caisse minute », conçue par Wincor Nixdorf, s’offrent aux clients, proposant le paiement en carte et en espèces, avec rendu de monnaie. « Nous proposions notamment un scanner bi-optique plus “ agressif ” que celui des caisses traditionnelles, afin que les clients scannent plus facilement », se remémore Laurent Houitte, directeur marketing de Wincor Nixdorf.
Risque de casse sociale
Dès lors, le débat sur l’automatisation des caisses est lancé, et le spectre d’une ligne de caisses « 100% automatique » est agité. Les syndicats de personnel figurent parmi les premiers contempteurs des SCO, soulignant le risque de casse sociale. La France comptait alors 200 000 hôtesses de caisses. « Les effectifs ont baissé dans le temps, mais il n’y a pas eu de suppressions directes d’emplois, plutôt des non-remplacements », affirme Carole Desiano, secrétaire fédérale en charge de la grande distribution chez FO. Son syndicat est l’un de ceux à ne pas s’être opposé sur le principe à la « modernisation » des caisses. « Nous étions et sommes vigilants, explique-t-elle. Les discussions en CHSCT ont été vives. Nous voulons garantir une bonne ergonomie pour le personnel et la prise en compte de nouveaux besoins de formation et de risques. » L’aspect positif « On a pu mettre à ces postes de supervision de caisses automatiques des personnes inaptes à porter des charges lourdes en caisses traditionnelles, par exemple », constate-t-elle. En revanche, « ce poste implique une grosse charge nerveuse, davantage qu’une caisse traditionnelle », déplore Carole Desiano.
Rapidité des caissières
Les distributeurs ont, de fait, avancé avec prudence sur le sujet. « Les engagements qui avaient été pris par Auchan, c’est-à-dire aucune suppression de poste, ont été tenus, précise Jean-Pierre Aguilera, responsable national caisses chez Auchan France. Et ce, car nous nous sommes concentrés sur l’objectif principal du système, qui est d’améliorer la fluidité en caisses. » Chez Auchan, qui compte un millier de « caisses minutes » déployées, la clientèle la plus assidue historiquement a été celle des seniors. Le distributeur nordiste est, aujourd’hui, le premier à introduire en France une nouvelle génération de caisses automatiques dites « réversibles », qui basculent en cas de besoin en configuration « traditionnelle ». Une manière de souligner que les deux types de passage en caisse restent nécessaires dans l’offre des magasins. D’autant que la productivité des hôtesses en phase de scanning (trois secondes) reste deux fois supérieure à celle des clients (six secondes).
Avantageset limites
- La perception du temps d’attente client a changé : la SCO est une alternative aux petits panierset augmentele nombrede caisses disponibles aux heures creuses.
- La grogne sociale s’est apaisée.
- Le risque de vol est contenuà conditionde mettreles moyens adéquats.
- Les tickets restaurantsou coupons de réduction sont toujours traités par l’hôtesse.
- La productivité du client pour scanner reste inférieure à celle de la caissière.