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LSA - Le marché du bricolage-jardinage s'accommode généralement bien des périodes de mauvaise conjoncture. Pourtant, depuis plus de quatre ans, les croissances annuelles sont faibles, voire négatives. Comment l'expliquez-vous ?
Jean-François Boucher - On le dit en effet, et à juste titre. Ce sont des marchés refuges, très bien armés pour résister aux périodes économiques moroses. Les performances très moyennes de ces dernières années sont dues à plusieurs facteurs.
Le premier est sans doute, il y a quatre ou cinq ans justement, la forte progression des discounters qui ont plutôt tiré nos marchés vers le bas. Le deuxième est l'accumulation de ces périodes de crise, quasiment sans interruption depuis quatre ou cinq ans. Cela ne relève plus de la mauvaise conjoncture, mais, tant pour les enseignes que pour leur clientèle, de nouvelles conditions de vie auxquelles il faut s'adapter. L'an dernier à la même époque, j'entendais : « Nous sortons de la crise... ». Peut-être, mais la crise des dettes souveraines nous y a, de fait, replongés durant l'été. Depuis le début de l'année, les indicateurs sont bons. La croissance semble revenir. Mais il faut rester prudent.
Enfin, il y a eu le vote de la LME qui nous a particulièrement pénalisés en dégradant l'équilibre de notre trésorerie. Nous payons plus tôt nos fournisseurs, mais nos stocks ne tournent pas plus vite pour autant. Cela a pu provoquer un réajustement des assortiments, des mises en place moins précoces et moins massives, et donc, ici ou là, des ruptures de stocks et des ventes auxquelles nous aurions pu prétendre mais que nous n'avons pas réalisées. Une chose est sûre, cela n'a pas contribué à la dynamisation de notre activité.
LSA - Faut-il être impressionné par les très forts taux de croissance enregistrés par certains sites de vente en ligne ?
J.-F. B. - Oui et non. Encore une fois, les données précises manquent pour avoir une idée exacte de l'efficacité d'internet en termes de ventes. Cela dit, oui, on peut être impressionné par les performances de certains sites qui revendiquent depuis plusieurs années + 10%, + 20% et parfois plus de croissance annuelle. Selon mes informations, la croissance moyenne est beaucoup plus faible, plus proche des 5%. Les nouveaux entrants décollent rapidement, c'est souvent vrai, puis la croissance retombe vite à des taux plus modestes. Enfin, ces taux ne sont peut-être pas obtenus à partir d'une offre très large telle que celle que l'on peut trouver dans nos magasins...
LSA - Les deux sont donc compatibles...
J.-F. B. - Oui, bien sûr. Et il ne faut surtout pas les opposer. Ils sont complémentaires et doivent évoluer. Aussi bien les magasins que les sites. Je suis d'ailleurs convaincu que le client désire « le meilleur des deux mondes ». Internet est un très bon support de préparation de l'achat, d'exploration de l'offre disponible, mais ne remplace pas l'humain, le conseil, l'aspect rassurant que l'on trouve sur site pour mener à bien un projet souvent complexe. Nous allons tester cette année un nouveau concept qui se caractérisera par la volonté de construire une synergie entre un canal internet riche en services, et des magasins où l'offre de services et de conseils sera également très présente et même renforcée.