L'hygiène papier, un savoir-faire français

Même si les principales marques du secteur appartiennent à des groupes étrangers, leurs produits sont, pour beaucoup, encore conçus et fabriqués sur le territoire national.

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L'hygiène papier, un savoir-faire français

Le Trèfle, Lotus, Nett, Sopalin… L’hygiène papier compte de nombreuses marques françaises qui ont gardé une forte notoriété auprès des consommateurs, et restent des leaders sur leurs catégories. Et même si, aujourd’hui, elles appartiennent à des groupes étrangers, leurs produits sont toujours fabriqués dans l’Hexagone. L’industrie de l’hygiène papier reste locale, au vu de la logistique qu’elle nécessite.

Le champion du made in France ? SCA, avec cinq usines. Le groupe y fabrique le papier toilette et les mouchoirs Lotus, l’essuie-tout Okay, les cotons Demak’Up, mais aussi les produits d’essuyage pour les professionnels Tork et de nombreuses MDD. En effet, SCA affirme réaliser 80 % des produits d’essuyage papier vendus sous marques de distributeurs. La France représente un chiffre d’affaires d’environ 1 milliard d’euros. « Elle est très importante pour le groupe : c’est son quatrième marché », souligne Marc Specque, porte-parole de SCA France.

C’est d’ailleurs sur son site de Kunheim, en Alsace, que le groupe suédois a basé son centre de recherche et développement mondial pour le papier. Et ce n’est pas sans raison : Kunheim est le berceau de Lotus, né en 1966, une marque qui n’a cessé d’innover au fil des ans, avec notamment les étuis de mouchoirs compacts en 1985 ou l’Aqua-Tube en 2011 (LSA n° 2400). Les produits Lotus sont également fabriqués à Gien (Loiret). Kunheim dessert l’est de la France et Gien, la partie ouest. Si l’usine loirétaine est plus jeune que l’alsacienne, elle a tout de même fêté ses 35 ans en septembre dernier. Outre Lotus, ces deux sites fabriquent également les essuie-tout Okay. SCA Hondouville (Eure) se consacre à Demak’Up et à Tork. Enfin, les implantations de Saint-Étienne-du-Rouvray (Seine-Maritime) et Le Theil-sur-Huisne (Orne) sont dédiées aux MDD. SCA explique que la proximité de ses usines avec les lieux de commercialisation de ses produits lui permet de minimiser ses coûts de transports et, par conséquent, ses rejets de CO2 dans l’atmosphère.

La proximité pour plus de flexibilité

La proximité : un atout qui a également été décisif pour l’implantation de Renova en France. L’entreprise portugaise a en effet acquis, l’an passé, un ancien site Candia, à Saint-Yorre (Allier). Une première ligne de transformation de papier en « enroulés » (papier toilette et essuie-tout) a déjà été installée, et la production a débuté en mars dernier. C’est la première usine de Renova en dehors du Portugal. « Elle nous permettra de gagner en flexibilité pour desservir la France et le reste de l’Europe », explique Paulo Pereira da Silva, PDG de Renova.

La société a, il est vrai, de fortes ambitions. Pour l’instant, le Portugal est son premier marché, suivi de l’Espagne. « Mais la France devrait rapidement dépasser l’Espagne », confie le PDG. Renova s’est fait connaître hors de la péninsule Ibérique par ses produits premium, dont le célèbre papier toilette noir, vendus dans les boutiques de décoration et autres concept-stores. Pour conquérir la grande distribution, la marque a développé des gammes à des prix plus accessibles. Depuis cette année, elle est référencée dans toutes les enseignes françaises de GMS. « Mais nous ne sommes pas encore présents dans tous les magasins. Il y a encore du travail à faire », précise Paulo Pereira da Silva. Et pour cela, le groupe veut mettre en avant son savoir-faire. « Renova, ce n’est pas seulement des couleurs et du design ; c’est avant tout de l’innovation. Nous avons été les premiers, par exemple, à proposer du papier toilette avec une lotion, rappelle le PDG. Actuellement, nous travaillons sur le cœur du produit : les fibres. Nous avons investi 50 millions d’euros dans une nouvelle technologie de machine à papier, encore inédite en Europe. »

Si ce travail de R&D est pour l’instant entièrement réalisé au Portugal, une partie pourrait être à moyen terme délocalisée en France. « Il y a ici un terreau fertile à l’innovation, de nombreux laboratoires de recherche avec la proximité des universités comme celle de Clermont-Ferrand », constate Paulo Pereira da Silva. Mais, pour l’instant, la priorité est l’usine. Colorés, design, les bureaux ouverts viennent d’être conçus à la mode Renova. « L’important pour moi était de créer un esprit start-up, car, en France, Renova est une start-up », souligne le PDG. Le site de Saint-Yorre emploie aujourd’hui une trentaine de personnes. « En nous installant ici, avec les a priori que l’on peut avoir sur la France vue de l’étranger, mes craintes portaient sur le facteur humain. Et pour l’instant, c’est le facteur humain qui me plaît le plus », se réjouit Paulo Pereira da Silva.

Une industrie prisée par les groupes étrangers

L’hygiène papier est en effet un très bon exemple d’industrie où les groupes étrangers n’ont pas peur d’investir chez nous. Ainsi, le belge Ontex, un des géants européens de l’hygiène, inaugurera, le 1er décembre, une usine flambant neuf à Dourges (Pas-de-Calais). Y seront regroupées les activités de ses anciens sites nordistes d’Arras et de Wasquehal. Grâce à ce site, Ontex veut poursuivre son développement sur les produits d’incontinence, vendus dans les hôpitaux ou à marques de distributeurs.

Le belge n’est pas le seul à créer de nouveaux sites. L’italien Sofidel, qui a racheté les marques Sopalin et Le Trèfle en 2010, a construit à Ingrandes (Maine-et-Loire) une nouvelle usine, qui a commencé sa production en août 2015. Un investissement décidé, car le site voisin de Buxeuil (Vienne) était trop petit pour réaliser les projets de développement du groupe. En plus d’Ingrandes, Sofidel possède deux sites de production, à Frouard (Meurthe-et-Moselle) et à Roanne (Loire). « Plus de 90 % des produits que nous vendons en France sont fabriqués dans ces trois usines, déclare Christophe Brosius, directeur marketing de Sofidel France. Nous y faisons régulièrement des investissements, afin d’améliorer la qualité de nos produits et de réduire notre impact sur l’environnement. » Ainsi, à Frouard, Sofidel a investi 7 millions d’euros pour la construction et la mise en service d’une centrale biomasse, il y a deux ans. « 20 % des besoins énergétiques du site sont couverts par la centrale biomasse », précise Christophe Brosius. Une énergie plus propre qui permet à l’usine de réduire son empreinte de 12 500 tonnes par an.

Chez SCA, la diminution de l’impact des activités sur l’environnement est aussi un axe prioritaire. « À Gien, sur les huit dernières années, nous avons réduit de 3 % notre consommation d’eau (qui est recyclée à 95 %), de 34 % notre empreinte carbonne, de 34 % nos déchets (dont 95 % sont recyclés) et de 10 % notre consommation d’énergie, explique Francis Derouet, porte-parole de SCA Gien. Nous avons aussi arrêté notre chaudière à charbon pour passer sur une chaudière à gaz. Le dernier investissement majeur date de 2013. Il s’agit d’une station biologique de traitement des eaux, ce qui nous a permis d’anticiper de cinq ans l’évolution de la réglementation européenne. »

Si l’industrie de l’hygiène-papier dessert principalement le marché national, elle exporte également. « Notre usine historique de Sezanne [Marne, NDLR] se partage avec un autre de nos sites, en Allemagne, la production de tampons hygiéniques pour toute l’Europe et l’Asie, dont ceux de la marque Nett pour la France », explique Elisabeth Airiau, responsable marketing hygiène féminine chez Johnson & Johnson. Idem pour l’américain Kimberly-Clark : son site de Sotteville-lès-Rouen (Seine-Maritime) fabrique des boîtes de mouchoirs Kleenex pour toute l’Europe de l’Ouest. Quant à celui de Villey-Saint-Étienne (Meurthe-et-Moselle), spécialisé dans les produits d’essuyage pour les professionnels, il exporte jusqu’en Asie. Il a été élu Usine de l’année en 2015 par nos confrères de l’Usine nouvelle, grâce aux améliorations qui sont apportées en continu, tant au niveau de l’outil de production que de l’organisation, de la logistique ou de l’empreinte environnementale.

La résistance face à « l’envahisseur »

Mais si la majorité du tissu industriel est occupée par des groupes étrangers, il reste une usine en Armorique qui résiste encore et toujours à « l’envahisseur » : Les Celluloses de Brocéliande. Acquises en 1990 par Intermarché, elles sont spécialisées dans l’hygiène féminine et les changes pour bébé. Ce sont 3,7 millions de produits qui y sont fabriqués par jour, principalement pour les MDD d’Intermarché : Pommette pour les couches bébé et Labell pour les serviettes et protège-slips. Les Celluloses de Brocéliande ont également leur marque propre, Nid d’ange, et proposent aussi leurs services à d’autres distributeurs, grossistes ou professionnels de l’hygiène. Les Celluloses de Brocéliande sont l’un des deux seuls producteurs de couches en France.

L’export à la rescousse

Le deuxième ? BB Distribe, à Laval-sur-Vologne (Vosges). « J’ai racheté cette société en août 2011, alors qu’elle était en liquidation judiciaire. Aujourd’hui, l’entreprise est à nouveau sur les rails, se réjouit Laurent Andrès, président de BB Distribe. Elle emploie 40 personnes et embauchera certainement l’année prochaine, car nous sommes en train d’installer une nouvelle machine, qui nous permettra de doubler nos capacités de production. Nous pourrons fabriquer 360 millions de changes par an. » BB Distribe commercialise ses produits sous trois marques : Bibou Dry, Fixies (plus premium) et Bio Babby (produits écologiques). Et c’est grâce à l’export que la PME entend se développer. « Nos produits sont commercialisés dans 35 pays à travers le monde, notamment en grande distribution », assure Laurent Andrès.

En effet, sur le marché national, il est extrêmement compliqué pour une PME de se faire une place entre Pampers et les MDD. Bio Babby est du coup vendue dans les circuits spécialisés bio et Fixies croît en pharmacwies. Mais ce développement est plus lent qu’à l’export. « 65 % de notre chiffre d’affaires sont réalisés à l’international, et ce pourcentage devrait continuer à augmenter car nous sommes en train de signer avec de nouveaux clients étrangers. Si, au départ, nous avons beaucoup démarché, aujourd’hui, on vient nous chercher. La qualité de nos produits made in France est reconnue à l’étranger », conclut Laurent Andrès.

Des catégories à la santé variable

 

 

 

 

 

Le contexte

  • Un marché de l’hygiène papier stable au global, mais qui cache de fortes disparités selon les catégories.
  • Une production française existe pour la plupart des segments du marché.
  • De nombreux groupes étrangers continuent à investir en France.

Les chiffres

  • 3,85 Mrds€ : le CA de l’hygiène papier
  • -0,1% : l’évolution en valeur CAM au 4 septembre 2016 et évolution par rapport à la même période en 2015, tous circuits

Source : Nielsen

SCA fête les 35 ans de Gien

  • 410 employés
  • 12 hectares de bâtiments
  • 7 M de mouchoirs produits en moyenne par jour
  • 2 M de rouleaux de papier toilette et d’essuie-tout produits en moyenne par jour

Sa vocation

L’usine de Gien (Loiret) est l’un des cinq sites de production de SCA dans l’Hexagone. Il fabrique principalement du papier toilette et des mouchoirs Lotus ainsi que l’essuie-tout Okay, à destination de l’ouest de la France. L’Est est couvert par l’usine historique de Lotus à Kunheim, qui abrite aussi le centre mondial de R&D de SCA pour le papier.

Renova investit à Saint-Yorre

  • 30 employés
  • 17 000 m² de bâtiments
  • 8 000 tonnes de papier toilette et d’essuie-tout, la capacité de production annuelle de la première ligne

Sa vocation

Première usine de Renova hors du Portugal

Le site de Saint-Yorre a été acquis l’an passé pour servir le marché français et le nord de l’Europe. La production a démarré en mars 2016, et Renova compte poursuivre le développement du site dans les années à venir, avec de nouvelles lignes de transformation et l’installation d’une machine à papier.

La diversité du made in France

 

En installant l’usine en France, mes craintes portaient sur le facteur humain. Et, pour l’instant, c’est le facteur humain qui me plaît le plus.

Paulo Pereira da Silva, PDG de Renova

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