L'upcycling, ou l'art de valoriser les déchets alimentaires
Des coquilles de fruits de mer qui se muent en carrelage ou en objets de décoration. Des drêches de brasserie transformées en macaronis et en farine, des terrines issues de pièces de gibier dont personne ne veut… L'alimentaire offre une source inépuisable et durable de nouveaux ingrédients. Cette tendance, baptisée « upcycling », n'en est qu'à ses débuts.
Sylvie Leboulenger
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Sylvie Leboulenger
Définition
L'upcycling est l'ensemble des procédés par lesquels on transforme une partie d'un produit inutile en un nouveau produit de qualité. On parle également de surcyclage ou de valorisation.
Ce qui favorise l'« upcycling »
- Un contexte réglementaire et économique (loi Agec) nettement en faveur du biosourcé et du recyclé.
- C'est un levier pour réduire les émissions de CO2, économiser de l'eau et des surfaces cultivables. En un mot, un outil de lutte contre le réchauffement climatique.
Tout, dans notre époque, pousse à recycler. La tendance s'est emparée de la mode, de l'électroménager, de l'ameublement, mais également de l'alimentaire. Les pays anglo-saxons, très en avance sur ce sujet, l'appellent upcycling, autrement dit le fait de réutiliser ce qui n'était qu'un déchet, en le valorisant. C'est ainsi, par exemple, que les presseurs de fruits valorisent les peaux d'oranges en les vendant pour extraire leur huile essentielle.
Mais aujourd'hui, la tendance va plus loin. Et pour cause. La loi Agec est passée par là et l'un de ses articles invite les industriels à chasser le gaspillage. « En France, on estime que 12 millions de tonnes de coproduits sont rejetées chaque année. Ils proviennent essentiellement des industries de trituration des oléagineux, des sucreries, des amidonneries, de la meunerie, la distillerie… Si certains sont valorisés dans l'alimentation animale, les biocarburants, les cosmétiques ou en agronomie, on pourrait valoriser beaucoup mieux » , remarquent Camille Berrocal et Constance Goujard, dans une étude sur l' upcycling réalisée pour le club PAI.
Un phénomène qu'ont bien perçu de jeunes entrepreneurs. Ainsi, Julien Lesage, fondateur de la société Hubcyle en 2016, est aujourd'hui leader sur le marché des ingrédients fabriqués à partir de coproduits alimentaires. « En 2021, la société a revalorisé 730 tonnes de coproduits destinés à être jetés, générant une économie d'environ 1 500 tonnes de CO2, détaille Julien Lesage. L' upcycling a un impact quand on fait plus avec moins. » Hubcycle s'est ainsi intéressé à la fine couche qui sépare la cosse de la fève de cacao, un « manteau » jeté parles chocolatiers et que la start-up fait transformer chez un partenaire en un arôme de cacao puissant. Dans l'industrie des oléagineux, les résidus du pressage des huiles deviennent des tourteaux riches en fibres et protéines qui filent vers l'alimentation du bétail. Ces tourteaux ont les mêmes qualités chimiques que celles du blanc d'œuf. Ils intéressent notamment la boulangerie industrielle, qui voit ainsi un moyen d'améliorer le Nutri-score de certains de ses produits qui, à leur tour, deviennent riches en protéines et en fibres. Une boucle vertueuse.
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