La parapharmacie s'emballe pour l'e-commerce

Enseignes alimentaires, pure players, pharmaciens ou marques… De nombreux acteurs investissent pour développer la vente en ligne de ce marché en bonne santé. 

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La parapharmacie s'emballe pour l'e-commerce
De nombreuses marques de parapharmacie exigent que leurs distributeurs aient des points de vente physiques pour être autorisés à vendre leurs produits sur internet.

Mieux vaut tard que jamais. Avec un mois de retard sur la date initialement annoncée, E. Leclerc a mis en ligne son site d’e-commerce dédiée à son offre parapharmacie (https ://www.parapharmacie.leclerc), le 9 mai dernier. Quinze jours auparavant, c’est Carrefour qui élargissait son offre drive à 2 000 références de parapharmacie. Les deux mastodontes de la grande distribution ne sont pas les seuls à investir ce créneau. Pharmaciens, spécialistes de l’e-commerce et marques s’intéressent de plus en plus à la vente en ligne qui ne représente que 2% du chiffre d’affaires de la parapharmacie (4,3 milliards d’euros). Ainsi, l’an passé, la place de marché 1001Pharmacies et le toulousain Santédiscount ont levé des fonds pour soutenir leur croissance : 8 millions d’euros pour le premier et 2 millions d’euros pour le second. Les groupements de pharmaciens s’y mettent également, à l’instar de LeaderSanté qui fait monter son site e-commerce en puissance depuis deux ans. La division Cosmétique Active de L’Oréal a, pour sa part, lancé l’an passé my-dermacenter.com, une plate-forme qui lui permet, entre autres, de vendre les produits de ses différentes marques (Vichy, La Roche-Posay, Sanoflore, Skinceuticals, Roger Gallet). Sans compter l’arrivée d’acteurs étrangers comme le belge Newpharma qui a acquis paraseller.fr et parafemina.com en 2015 et monguidesanté.com en 2014.

Un circuit devenu incontournable

Pourquoi un tel engouement ? D’abord, parce que les différents acteurs commencent à comprendre que « le digital, on ne peut pas s’en passer et ce, à tous les niveaux : pour la formation, le merchandising, la communication… », énumère Olivier Macé, directeur retail de L’Oréal Cosmétique Active France. Un constat que les autres circuits de distribution ont fait depuis un moment déjà. « Marques, enseignes de parapharmacies ou pharmaciens, la majorité des acteurs sont à la traîne en ce qui concerne le digital. La résistance vient notam­ment du fait qu’ils ont longtemps eu peur que leur image médicale-santé, soit dégradée sur internet », explique Timothée Raymond, cofondateur de l’agence Equinoa. Et encore aujourd’hui, les marques sont très vigilantes. Beaucoup imposent des conditions de distribution sélective à la vente sur internet comme un environnement qualitatif dédié ou la possibilité pour les internautes de recevoir un conseil en ligne délivré par un ­diplômé en pharmacie. Des conditions qui ont poussé E. Leclerc à proposer un site e-commerce très épuré par rapport à ses autres sites marchands et où le numéro du service client est mis en avant. Carrefour a, pour sa part, déjà revu sa copie afin que son offre para ne soit pas mélangée avec le reste des produits de ses sites drive. L’enseigne précise que les commandes passées dans l’un des 55 drives proposant cette offre sont préparées par le pharmacien responsable du corner parapharmacie du magasin concerné.

Une caution dermatologique rassurante

L’attrait de la parapharmacie tient aussi au fait que le marché se porte bien, en particulier sur l’hygiène-beauté. « Selon IMS, le marché de la dermocosmétique a augmenté de 4,6% en 2015. Il est intéressant de constater que le chiffre d’affaires de la dermocosmétique progresse de manière équivalente en pharmacies (+ 4,2%) et parapharmacies (+ 5,5%). Il y a un public pour chaque », constate Olivier Macé. Dans le seul circuit des parapharma­cies de grandes surfaces, selon Iri, le chiffre d’affai­res 2015 de l’hygiène-beauté s’élève à 503 millions d’euros, soit une croissance en valeur de 5,6% et de 5,8% en volume. Des hausses bien supérieures à celle du rayon hygiène dans les hypers et supermarchés (+ 0,9%). La caution dermatologique, la demande croissante de produits hypoallergéniques, le rapport qualité/prix considéré meilleur qu’en parfumeries sont autant d’éléments qui expliquent que de plus en plus de consommateurs ­fréquentent ce circuit. Des atouts jouent aussi en sa faveur pour son développement sur la Toile. Le cabinet de conseil en stratégie et marketing Simon- Kucher & Partners a réalisé en février une étude quantitative sur les tendances de consommation cosmé­tiques des Françaises, en partenariat avec Research Now. « Elle montre que 57% d’entre elles sont encore réfractaires à l’achat sur internet de soins du visage, indique Martin ­Crépy, associé au bureau parisien de Simon-Kucher & Partners. L’enjeu réside sur la capacité à rassurer. » Ce dont le pharmacien est capable. D’ailleurs, cette étude montre que le premier vecteur d’achat en pharmacie est le conseil. « Les soins du visage sont principalement achetés dans les supermarchés pour le prix ou dans les pharmacies pour le conseil et l’expertise. En parfu­meries, les conseillères beauté sont souvent dédiées à une marque et leur avis n’est pas perçu comme objectif, contrairement à celui des pharmaciens », précise Martin Crépy.

Sans nier la dimension commerciale de son ­activité, Giphar, enseigne coopérative qui regroupe 1 300 officines, se positionne sur l’éthique et le conseil, et ne se reconnaît pas dans le discount. « Il ne faut pas oublier la dimension santé. Notre site est avant tout consulté pour obtenir des informations sur des pathologies et du conseil, note Agnès Tirilly, directrice marketing enseigne et communication du groupement Giphar. Peu de nos adhérents ont une page e-commerce. Ce canal reste marginal dans le chiffre d’affaires des officines. Toutefois, internet est un de nos axes de développement, car il permet d’apporter plus de services et de ­renforcer la proximité avec les patients. » Le site de Giphar dispose d’un « store locator » qui permet de situer la pharmacie de l’enseigne la plus proche. Une façon de faciliter le web-to-store que d’autres ont adoptée, comme L’Oréal Cosmétique Active. « Les pharmaciens apprécient que nous ayons mis en place cet outil, assure Olivier Macé. Avant d’être un site marchand, My Dermacenter est surtout un moyen d’apporter des services comme la ­possibilité de réaliser des diagnostics de peau pour orienter les consommateurs vers des soins adaptés à leurs besoins. L’e-shop permet surtout de commander les produits de nos marques qui ne sont pas chez tous les pharmaciens, tel le maquillage La Roche-Posay. »

Compétition toujours vive avec la GMS

Un discours rassurant pour ménager les distributeurs, qui est très fréquent chez les marques de beauté. Chez E.Leclerc, les ambitions en e-commerce sont clairement affichées : « Nous visons un chiffre d’affaires de 30 à 40 millions d’euros d’ici à trois ans. La santé est un des plus gros secteurs de consommation qui va se développer dans les dix ans, car il y a un vieillissement inéluctable et souhaité de la population. Le corps devient une préoccupation centrale des Français, une préoccupation identitaire dans leur relation sociale. C’est un domaine sur lequel il faut investir », confiait Michel-Édouard Leclerc il y a quelques jours à LSA. Pour Alexis Berreby, cofondateur de Leader Santé, « l’arrivée de la GMS est de bonne guerre. Après tout, dans nos pharmacies, avec notre offre Leader Market, nous proposons régulièrement des produits de GMS vendus moins chers qu’en GMS ».

Car la compétition entre GMS et pharmaciens sur les prix est toujours vive sur le terrain. En mars, le tribunal de la Roche-sur-Yon a condamné E. Leclerc à verser à une officine du réseau Univers Pharmacie des indemnités de 10 000 € pour « préju­dice d’image et moral » et 11 387 € pour « la perte de chance de réaliser un chiffre d’affaires et une marge brute plus importants ». En cause : un spot publici­taire où l’enseigne affirmait vendre 33% moins cher ses produits de parapharmacie qu’Univers Pharma­cie. Pour la justice vendéenne, ce comparatif est « trompeur et erroné ». Cette victoire a incité 130 autres pharmacies à saisir la justice. Nul doute que la guerre est loin d’être finie et que le dévelop­pement en e-commer­ce risque de l’attiser. Sans parler du débat sur la vente des médicaments…

Le contexte

  • Selon E. Leclerc, la parapharmacie représente un chiffre d’affaires de 4,3 Mrds € dont 80,5% sont réalisés par les pharmacies et 17,5% par les parapharmacies de GMS ou indépendantes.
  • L’e-commerce représente seulement 2% des ventes pour l’instant.
  • Le circuit pharmacie/parapharmacie est celui où les ventes d’hygiène-beauté progressent le mieux.

Des marques réfractaires à la vente en ligne

Il n’y a pas qu’en parfumerie que les marques sont pointilleuses quant à leur image. Certains acteurs ont pendant longtemps refusé que leurs produits soient vendus sur internet, à l’instar du groupe Pierre Fabre. Mais la justice et l’Autorité de la concurrence ont forcé les marques à revoir leur position.

Aujourd’hui encore, dans le cadre d’un contrat de distribution sélective, beaucoup exigent que leurs produits soient vendus dans un environnement qualitatif et uniquement par des distributeurs agréés ayant au moins un point de vente physique.

C’est pourquoi Carrefour Drive a revu sa copie afin que son offre « para » ne soit pas mélangée avec le reste des produits de son site. Une boutique spécifique a été créée dans ce but et, dans le panier du client, les achats para sont mis dans un bloc à part. Parmi les plus réfractaires, citons Caudalie. Le laboratoire cosmétique autorisait ses pharmaciens agréés à vendre via un site propre, mais refusait catégoriquement qu’ils vendent via une place de marché.

Saisie par 1001Pharmacies, la cour d’appel de Paris a jugé, le 2 février dernier, que cela pouvait constituer une restriction de concurrence caractérisée. Des produits Caudalie sont donc proposés via cette place de marché. En revanche, ni E. Leclerc ni Carrefour ne commercialisent de références de la marque en ligne pour l’instant.

« La santé c’est un des plus gros secteurs de consommation qui va se développer dans les dix ans et sur lequel il faut investir. Nous visons, via notre site dédié à la parapharmacie, un chiffre d’affaires de 30 à 40 millions d’euros d’ici à trois ans. »

Michel-Édouard Leclerc PDG d’E. Leclerc

« Marques, enseignes de parapharmacies ou pharmaciens, tous les acteurs de ce circuit sont à la traîne en ce qui concerne le digital. La résistance vient notamment du fait qu’ils ont peur que leur image médicale soit dégradée sur internet. »

Timothée Raymond Cofondateur de l’agence Equinoa

« L’e-commerce reste marginal dans le chiffre d’affaires des officines, mais internet est un de nos axes de développement. Ce canal permet d’apporter plus de services et de renforcer la proximité avec les patients. »

Agnès Tirilly directrice marketing enseigne et communication du groupement Giphar

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