
C’est l’un des plus grands défis de son histoire. Le numérique oblige La Poste à se réinventer, et Philippe Wahl, le PDG du groupe, en est bien conscient : "Dans quinze ans, il n’y aura plus de lettres. Le digital bouscule notre modèle économique, mais il est aussi la solution à notre problème", a-t-il déclaré à l’occasion du CES Unveiled de Paris, le 21?octobre dernier.
Au-delà du discours, les actes témoignent de l’engagement de La Poste en ce sens. En atteste la prise de participation de l’entreprise – à travers GeoPost, sa filiale express internationale –, à hauteur de 80 % du capital de Resto-in, une marketplace de restaurants qui promet la livraison de repas à domicile en moins de quarante-cinq minutes. L’alimentaire d’une part, l’e-commerce d’autre part, La Poste le sait, "ces deux secteurs en fort développement répondent aux usages créés par la révolution numérique", indique le groupe. GeoPost ne s’en cache pas, l’e-commerce alimentaire est l’opportunité rêvée de diversifier son activité, raison pour laquelle la société vient d’investir dans l’application mobile Stuart – inventée par les managers de Resto-in –, qui permet d’être livré dans un lieu précis par un coursier professionnel en moins d'une heure.
L’offensive discrète d’Uber
Des initiatives positionnées, volontairement ou non, face à l’américain Uber qui propose aussi ce type de service. Après New York, Los Angeles, Seattle ou encore Barcelone, UberEATS a fait une percée dans certains quartiers de la capitale française à la mi-octobre 2015. La promesse est claire : livrer les déjeuners au domicile ou au bureau des Parisiens en moins de dix minutes. En phase de test actuellement, le service propose la livraison de plats entre 11 h 30 et 14 h 30, à des tarifs compris entre 8 et 12 €, pour une livraison "gratuite, dans un premier temps", puis facturée 3 €. Pour les restaurateurs, Uber fait valoir l’opportunité d’initier des milliers de nouveaux clients à leur cuisine. Un créneau sur lequel les acteurs, et notamment de jeunes pousses du digital, se multiplient.
À l’instar de Resto-in, Allo Resto, pionnier français de la livraison de plats à domicile, a connu en 2014 une croissance de 46 % pour un chiffre d’affaires de 65 millions d’euros. Le potentiel de développement est bel et bien présent. Il faut dire que le marché mondial de livraison de repas est une manne financière considérable, estimée à près de 83 milliards d’euros à l’échelle mondiale, selon l’étude de Rocket Internet en mars 2015.
Une brèche lucrative
Dès lors, il n’est pas étonnant de voir une multiplication de sociétés s’engouffrer dans la brèche. Comme la start-up londonienne Deliveroo, qui a levé 70 millions de dollars en juillet dernier, pour se développer en Europe, mais aussi le service de livraison à la demande nommé Tok Tok Tok, ou encore la bruxelloise Take Eat Easy dans laquelle a investi 6 millions d’euros l’incubateur allemand Rocket Internet et qui vient de lever 10 millions d’euros supplémentaires. Reste désormais à savoir si La Poste s’est positionnée suffisamment tôt pour se tailler une part substantielle du gâteau.
Le Groupe La Poste en 2014
- 22,1 Mrds € de CA
- 513 M € de résultat net
- 17,9 % du CA à l’international
- 4,9 Mrds € de CA pour GeoPost
Source : La Poste
Avec Chronofresh, Chronopost se diversifie aussi par la livraison alimentaire
Avec sa nouvelle offre Chronofresh, Chronopost s’engage à prendre en charge tous les produits alimentaires – secs, frais ou surgelés –, les transporter, et les livrer dans le respect de la chaîne du froiden France, avant 13 heures le lendemain. D’ici à 2020, la filiale de La Poste va investir 20 M € dans une infrastructure dédiée.