Le « phoning » s'impose dans la crise
SYLVAIN AUBRIL
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SYLVAIN AUBRIL
Avec les sociétés de services, il est difficile de savoir si le budget qui leur est alloué est rentabilisé. Pourtant, ce serait le cas dans le domaine de la relation téléphonique entre les industriels et les chefs de rayon. Une approche efficace, à en croire LU (Kraft Foods) et Henkel.
Le principe consiste à coupler un commercial de terrain et un téléphoniste. « Les deux travaillent sur une base de données partagées avec un historique de la relation avec le magasin, mais le téléphone est froid. Il faut des personnes chaleureuses, livrant un message précis, avec des chiffres de gains potentiels de vente », expose Claire Charpentier, directrice chez Circular Multicanal et ancienne de Téléperformance. Et le téléphoniste doit toujours se référer au commercial en citant son prénom au chef de rayon, tout en poursuivant un objectif propre.
Un déroulé très précis
Le téléphoniste travaille en premier lieu sur la distribution numérique (« DN »). Il vérifie si le produit est bien en rayon. Si tel n'est pas le cas, il tentera de convaincre son interlocuteur de prendre son cadencier et de passer commande - les deux disposent du code-barres - en exposant les pertes de chiffre d'affaires générées par l'absence du produit.
Le « phoning », sur une base méthodologique solide, étayé d'une aide sur écran des phases dans le déroulé du dialogue, serait si fort qu'il limite les visites en magasins ou en améliore les performances. « Le phoning permet d'introduire la référence en magasins ; le vendeur se chargera de sa visibilité, sans quoi la référence tombe », ajoute Claire Charpentier.
Le levier téléphonique est aussi devenu très important du fait du « switch » des produits entrant et sortant en rayons en permanence. Ceux qui sont bien « armés » intègrent plus vite les linéaires ou s'y maintiennent mieux. Il y a aussi les périodes de déréférencements lors des négociations qui, lorsque les relations se renouent, nécessitent un retour en rayon rapide, ce que permet le phoning et pas la force de vente « face à face ».
Bien sûr, les lancements, les substitutions d'emballage, les opérations sur cartes de fidélité, y gagnent aussi. Plus simplement, le téléphoniste rappelle au chef de rayon les références à forte marge, « que nous appelons les " codes vaches à lait " », expose Claire Charpentier. Le tout en quelques minutes, neuf au maximum. Par rapport à la visite d'un commercial, le gain de temps vaut aussi pour le chef de rayon.
Des résultats vérifiables
Ainsi, LU, qui organisait 18 000 visites en face à face au premier semestre 2008, a vu la distribution numérique d'une référence grimper en flèche, puis chuter brutalement en raison de la crise et de la concurrence sans merci des MDD. Soutenue par le phoning, la DN est revenue à son niveau le plus haut, alors même que LU a diminué à 13 000 les visites en face à face, mais en touchant 15 600 fois des chefs de rayon par téléphone. « Il est sous-exploité dans la vente en GMS. Pourtant, son couplage à la vente terrain, d'une efficacité redoutable, en fait un levier très rentable », indique Arnaud Ronssin, responsable des ventes proximité de LU. Même satisfaction chez Henkel, pour SuperGlue. Le groupe arrive à un niveau de finesse du dialogue qui lui permet d'échanger sur les gains sur certaines références, 500 E par-ci, 600 € par là. Du concret pour les chefs de rayon. Même ceux d'Intermarché, les plus rétifs au dialogue commercial, seraient attentifs. Un signe d'efficacité, sans doute.
« Le téléphone est sous-exploité dans la vente en GMS. Pourtant, son couplage à la vente terrain, d'une efficacité redoutable, en fait un levier très rentable. »
ARNAUD RONSSIN, responsable des ventes proximité de LU