Les bières s'offrent un coup de jeune
L'année 2002 a démarré sur les chapeaux de roue. Derrière cette profusion, et son apparente hétérogénéité, il y a un dénominateur commun. Ce dernier va bien au-delà de la seule valorisation de l'offre. Il concerne les consommateurs, et plus précisément les 18-35 ans. Les séduire est devenu une véritable obsession pour les marques. Malgré ses huit siècles d'existence, Grimbergen vise clairement au rajeunissement de sa cible. Armée de sa dernière version en boîte métallique de 50 cl, la marque enfonce le clou (+ 19 % en volume). Leader du marché des bières blanches en GMS (56 % de PDM), Hoegaarden fait le même grand écart, malgré son nouveau « look », plus jeune, et des campagnes d'affichage au ton résolument décalé. Hoegaarden, dont la recette remonte à 1443, a toujours revendiqué haut et fort son caractère traditionnel. Et elle continue à le faire d'ailleurs. Ce qui est plus nouveau, c'est sa présence prévue cet été sur toutes les plages de France, fort d'un partenariat avec la radio Énergie, relayé par des concerts et des dégustations gratuites.
Les carcans sautent
Le dynamisme insolent des bières de spécialité a contraint l'ensemble du marché à réagir. Ce segment est toujours le seul gagnant avec - dans une moindre mesure - celui des spéciales (voir encadré). Les ingrédients sont relativement simples. Ils reposent aussi bien sur la largeur de l'offre (goût, origine des produits, conditionnement) que sur les promesses véhiculées par les marques : le voyage, l'exotisme pour Corona et Desperados ; la tradition pour Leffe ; la créativité pour Adelscott. Les carcans sautent. Au passage, le phénomène a entraîné un élargissement de la cible, avec des produits susceptibles de plaire aussi bien à une clientèle masculine que féminine. De nouveaux instants de consommation ont aussi été créés.Aujourd'hui, c'est un peu de cette dynamique que la catégorie reine - les bières de luxe - cherche à récupérer. Témoin, le lancement de 33 Export Demi-Rondelle. Contrairement aux autres bières aromatisées, Heineken préconise de placer le produit parmi les bières de luxe. La catégorie s'ouvre à de nouvelles saveurs, l'objectif étant ici d'éviter que les consommateurs ne partent vers d'autres segments.
En choisissant de positionner Foster's parmi les bières spéciales - malgré ses origines australiennes -, Kronenbourg s'inscrit dans la même logique. Les frontières s'estompent. Pour rajeunir son image et monter en gamme, c'est du côté du basket pack de six bouteilles, un format jusqu'ici surtout répandu dans les bières spéciales, que Stella Artois est allé puiser son inspiration. Interrogé dans nos colonnes (LSA n° 1728), Brice de Forsanz le reconnaissait lui-même : « La crédibilité d'un brasseur implique d'être bon sur tous les segments, y compris et même sur le coeur du marché. C'est en réinstallant le luxe dans l'esprit des moins de 35 ans que l'on pourra ramener demain la bière à table. »
Séduire de nouvelles cibles
Axe obligé, la valorisation de l'offre passe par un marketing puissant et des investissements massifs. Sur ces trois dernières années, près de 70 millions d'euros ont ainsi été investis rien que dans les médias Au même titre que le marché du vin, les ventes de bière se tassent. Les brasseurs n'ont guère d'autre alternative que de séduire de nouvelles cibles.Dans cette perspective, tous les « coups » sont permis : aromatisation, développement du long-neck et des capsules « twist-off ». Les grands brasseurs ont longtemps jeté un oeil bienveillant sur le développement des niches, considérant, à juste titre, qu'elles permettaient d'animer le rayon. Il y a quelques années, leur regard sur les bières de spécialités n'était guère différent. Avec plus de un million d'hectolitres écoulés en 2001, le marché leur doit aujourd'hui près de 20 % de son chiffre d'affaires