Les professionnels du bœuf veulent y croire encore
Pas question de céder au pessimisme ambiant, malgré les chiffres. Certains éléments laissent entrevoir de belles perspectives pour le développement du marché. Le point sur les principaux facteurs qui rendent les opérateurs confiants dans l’avenir.
Marie Cadoux
\ 13h17
Marie Cadoux
En 2013, les volumes de viande de bœuf ont reculé de 2%, soit quatre fois plus que le rayon boucherie, toutes espèces confondues, à - 0,5%. Une évolution que l’on est tenté de relier à la hausse du prix moyen de viande de bœuf (+ 3,9%, à 12,32?€ le kilo). Dans ce contexte, sa consommation fait l’objet d’arbitrages, d’autant plus qu’elle n’a pas très bonne presse auprès des nutritionnistes et défenseurs des grandes causes environnementales. Gare cependant aux conclusions hâtives ! Si les volumes sont en repli, certains points augurent de belles perspectives ou, tout du moins, ont tendance à rassurer les opérateurs. À cet égard, les données de Kantar Worldpanel pour 2013 sont riches d’enseignements.
Les ventes en volume de viande de bœuf fléchissent effectivement de 2% tous circuits confondus, et de façon encore plus marquée sur celui de la GMS, à - 3%. Cependant, celles qui sont effectuées via le circuit on-line, c’est-à-dire internet et le drive, ont fait un bond vertigineux de 153% en 2013 ! Les mauvaises langues pourront toujours dire que le drive (1,26% des ventes de viande de bœuf) ne pèse pas lourd. « C’est vrai », concède Denis Lerouge, directeur marketing et communication d’Interbev. Mais de faire remarquer que le drive, loin d’être un épiphénomène, est un circuit qui se développe très rapidement. Au point de peser désormais sur l’évolution d’un marché.
Non standardisé
Pour autant, la viande de bœuf n’est pas un produit de grande consommation comme les autres. 80% des volumes commercialisés le sont à poids variable, ce que ne permet pas le circuit du drive. Contrairement à une bouteille d’huile, la viande bœuf n’est pas non plus un produit standardisé.
Enfin, elle correspond à un achat « impliquant » de la part du consommateur. Rien d’étonnant d’ailleurs à ce que la viande hachée, qui constitue un produit standard et acheté majoritairement par les familles, soit la catégorie la plus importante dans le drive (2,58% des ventes de viande de bœuf). Autant d’éléments dont les distributeurs mais aussi les opérateurs doivent tenir compte s’ils veulent accélérer leur développement via ce circuit.
Toujours autant de clients
D’autres signaux penchent également en faveur d’une évolution positive du marché. Avec un taux de pénétration de 94,3%, la viande de bœuf reste consommée dans presque tous les foyers français. Auprès des moins de 35 ans, ce taux de pénétration est même en légère progression, à + 0,9%. « Signe de bonne santé, ce marché ne perd pas de consommateurs. En revanche, les quantités achetées à l’acte et la fréquence d’achat sont en recul. Ce sont sur ces leviers qu’il faut travailler », insiste Denis Lerouge, d’Interbev.
Dans le détail, les volumes de la viande hachée fraîche – 30% des quantités de viande de bœuf en GMS, soit 100 000 tonnes – gagnent 1,3%. Là encore, les opérateurs estiment plutôt rassurant de constater que le gros de la catégorie échappe à la baisse des ventes. Mieux, elle se valorise. Ainsi, la viande hachée à 5% de matières grasses (MG) – 30,3% des quantités de viande hachée – voit ses volumes progresser de 3,1%. La viande hachée à 15% de MG, qui constitue 39,7% des volumes de viande hachée fraîche, croît de 1,6%. À l’opposé, les ventes de viande hachée à 20% de MG dégringolent de 4,1%.
Toujours dans la catégorie de la viande hachée fraîche, les steaks détiennent une part de marché de 52,7%, avec des volumes en repli de 2,7%. En revanche, ceux de la viande en vrac, à 31,8%, augmentent de 6,5%. Là aussi, les opérateurs veulent y voir un signe encourageant. Cette catégorie de produit, si elle permet d’ajuster au plus près la quantité de viande utilisée dans les préparations culinaires, montre que les consommateurs ne sont pas prêts à renoncer au bœuf.
Enfin, dernière raison de penser que le marché peut renouer avec la croissance : la dénomination des morceaux. Engagé depuis 2006, ce dossier a été réactivé par la profession il y a deux ans, et pourrait aboutir d’ici au 1er?juillet. Actuellement, il est étudié à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF). « Le dossier est complètement finalisé. Ce n’est qu’une question de semaines », assure un proche de l’institution. L’enjeu est de taille. Faut-il, en effet, rappeler que l’un des principaux freins à la consommation réside dans la méconnaissance des morceaux. Que faire avec de la macreuse ou un rond de gîte
Trois critères sélectifs
Les désignations actuelles datent de 1993 et ne répondent plus aux attentes des consommateurs, perdus sans les conseils d’un boucher professionnel au rayon libre-service. Surtout, elles ne permettent pas de recruter une clientèle plus jeune. Ce dossier ne concerne d’ailleurs pas que la viande de bœuf, mais aussi l’agneau et le veau au rayon LS des GMS. Trois critères ont été retenus pour simplifier l’offre : le type de morceau, la destination culinaire (à griller, à rôtir et à mijoter), et enfin la qualité.
Pour déterminer la qualité, deux éléments ont été pris en compte : la tendreté pour les pièces à griller et le potentiel de moelleux pour les morceaux à mijoter. La notion de qualité sera exprimée sur une échelle de une à trois étoiles. Une fois que l’arrêté sera publié au Journal officiel, les distributeurs devront prendre le temps de reprogrammer les balances. Selon Denis Lerouge, « quelques mois d’effort seront nécessaires. Mais le jeu en vaut assurément la chandelle ». Les consommateurs jugeront donc.
Des volumes en repli sauf pour le canal on-line
Ventes en volume, en tonnes, de la viande de bœuf en 2013, par circuit de distribution, et évolution, en%, vs 2012 Source : Kantar Worldpanel
Sur les 314 394 tonnes de viandede bœuf vendues en Franceen 2013, la GMS constituele plus gros circuit de distribution, loin devant les spécialisteset le canal on-line, qui croîtquand même de 153%.
Dans presque tous les foyers
- 94,3% Le taux de pénétration de la viande de boeuf en 2013 (stable)
- - 0,8% La fréquence d’achat
- - 2% L’évolution de la quantité de viande de boeuf achetée à l’acte Une offre qui se valorise
- + 3,1% L’évolution des ventes de viande hachée à 5% de matières grasses
Le drive fait pencher la balance du bon côté
- 2% L’évolution des ventes de viandes de boeuf en GMS + drive - 3% L’évolution des ventes de viandes de boeuf en GMS sans le drive Source chiffres : Kantar Worldpanel, données 2013