Méforme du baby-food, à chacun sa parade
Les ventes de lait infantile plongent. Le reste de l'alimentation infantile stagne. Qu'à cela ne tienne, l'heure n'est pas à la réduction des assortiments, contrairement à d'autres segments de l'épicerie. Confrontées à la méforme du secteur, les marques ont décidé de se retrousser les manches pour redonner de la vigueur au rayon, à coup de rénovations de packaging et de formats plus adaptés à la demande. En début d'année, Nestlé n'a pas hésité à abandonner toutes ses marques filles pour les faire passer sous marque ombrelle, à l'exception de NaturNes. « Auparavant, la maman arrivait devant un vrai mur. Les primipares [maman pour la première fois, NDLR] étaient perdues, la stratégie de marques spécifiques ne permettant pas de faire émerger l'offre. Alors que la marque Nestlé embrasse toute la gamme et permet de trouver ses repères tout de suite », analyse Muriel Koch, directrice marketing diversification alimentaire chez Nestlé.
Agencer les catégories
La marque bio HiPP a également remis à plat tout son packaging, pour plus de clarté. Rien d'étonnant car, avec une moyenne de 510 références en hypermarchés et de 270 en supers, l'offre a besoin d'une lisibilité accrue. Surtout lorsqu'elle est segmentée par type de produit, par moment de consommation, puis par âge. Il est donc logique qu'elle soit perçue comme « atomisée », pour reprendre le terme utilisé par David Bruneau, directeur du développement commercial chez Blédina (Danone). « Dans les hypers, la taille de linéaire est satisfaisante. L'enjeu y est désormais l'agencement de l'ensemble des catégories bébé - alimentaire et non-alimentaire - au sein d'un même " univers bébé ". Mais dans les supermarchés, il y a encore de la place pour développer l'alimentation. » Un mantra répété par un autre connaisseur du secteur, qui constate que certaines enseignes étendent le linéaire en ajoutant une tablette supplémentaire, voire un meuble.
« La taille d'assortiment est justifiée car, en France, les mamans sont très sensibles à l'éveil au goût. Nous sommes sur des fréquences d'achat très élevées, de l'ordre de 25 à 26 actes par an », abonde Vincent Salette, directeur du développement commercial chez Nestlé. Ce discours se traduit dans les actes par un renouvellement assez fort des gammes, et par des actions spécifiques pour profiter des opportunités. Ainsi, les compotes de fruits NaturNes, auparavant vendues par quatre, ont été rendues disponibles par deux pour permettre aux acheteuses hésitantes de franchir le pas. Travailler sur les formats et sur le repérage en rayon est aussi un moyen de se faire remarquer (lire encadré), notamment sur le lait en poudre qui n'est pas à la noce.
Étendre les instants de consommation
Devant la morosité de l'alimentation infantile, une autre piste consiste à couvrir et à étendre au maximum les instants de consommation, ainsi que la période durant laquelle le bébé sera amené à manger des produits déjà préparés. « Nous continuons à travailler le segment des assiettes, avec la création d'une nouvelle tranche d'âge, le 15 mois, avec Blédichef. L'enjeu, c'est de bien accompagner l'évolution de bébé. On a créé un âge intermédiaire entre le 10-12 mois et le 18-24. Car le potentiel des grands bébés est important », confie David Bruneau.
Le spécialiste de l'alimentation bio pour bébés HiPP s'est également lancé sur le créneau des assiettes pour les enfants de 12 mois, marquant, s'il en était besoin, le ciblage de plus en plus pointu de la demande. D'autant que le bio affiche une santé insolente (à deux chiffres) dans le domaine de l'alimentation infantile, ce qui lui donne des arguments pour être intégré au rayon. Jean-Pierre Galéra, directeur de HiPP France, met en avant ses arguments : « Mon point de vue, ce n'est pas de dire que je vends du bio : je vends de l'alimentation infantile, qui, en plus, est bio. Ce qui m'intéresse, c'est de toucher des gens qui n'en achètent pas pour élargir au maximum le nombre de consommateurs. Notre implantation, c'est donc tout sauf du corner bio ! Notre place est à côté de Nestlé et de Blédina », soutient le patron, qui espère atteindre 40 millions d'euros de chiffre d'affaires, contre 25 millions aujourd'hui.
Chez Vitagermine (marque Babybio), l'heure est également au lancement d'assiettes de 260 g pour les plus de 15 mois, labélisées AB. Pour se différencier, la marque ne manque pas de rappeler l'origine française des aliments. « Nous proposons des meubles en bois et des stop-rayons " produit en France ". Les consommateurs y sont très sensibles », observe Christelle Planes, responsable marketing de Vitagermine. Derrière tous ces lancements et cette animation, on en oublierait presque que l'alimentation infantile souffre. Mais pris au piège du choix et de la variété, les intervenants n'ont d'autre choix que de se démener. Quitte à surcharger le rayon ?
LE LAIT FAIT GRISE MINE
- Total alimentation infantile : 925 M€
- 1,7% en valeur,
- 3,4% en volume
- Dont les laits infantiles : 375 M€
- 3% en valeur,
- 6,6% en volume
- Alimentation (petit déjeuner, plats et goûters/desserts) : 539 M€
- stable en valeur,
- 0,3 % en volume
Source : SymphonyIRI, CAM à début mai 2011, en hypers et supermarchés
Les deux géants loin devant
Part de marché en valeur, en %, des différents intervenants, CAM à début mai 2011, en hypers et supermarchés
Danone et Nestlé écrase le segment. Il ne reste plus que des niches à exploiter, comme celle des laits infantiles spécifiques ou le bio,
qui progresse fort comme dans tout le reste de l’alimentaire.
Source : SymphonyIRI
Couvrir tous les moments de la journée et tous les âges
« Il faut mettre en exergue une vraie visibilité du soir », souligne un intervenant du rayon. Dont acte, avec, chez Nestlé, sept lancements opérés sur ce segment précis sous la marque NaturNes, qui combinent les éléments favorables à une bonne nuit pour le bébé : légumes, féculents et lait. Chez Danone, on a élaboré des céréales du soir pour bébé dans la gamme Blédîner, disponibles en boîte de 250 g ou en dosettes. Autre piste explorée notamment par Vitagermine avec Babybio : la prolongation de consommation au cours des âges. L’important est de favoriser le passage d’une catégorie à une autre : du pot vers le bol, jusqu’à l’assiette, un format très en vue.
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Faciliter l’essai et le repérage
Concurrence de l’allaitement, mais également des pharmacies… le lait en poudre est un produit très bataillé. Danone a donc décidé de changer les codes, avec le lancement d’un format inédit pour le marché sous la forme d’une boîte Blédilait de 400 g,moins encombrante que le format standard (900 g). En lait de croissance (Blédilait 3), c’est un contrepied à la réduction de format, puisqu’une offre de 1,6 kg a été lancée cet été, avec un prix attractif. Sur la marque Gallia, septembre verra l’arrivée d’une boîte rectangulaire, en carton, de 900 g. L’objectif est d’être repéré tout de suite dans un océan de boîtes rondes. Sur son offre de pots de fruits, Nestlé a ajouté un format par deux pour favoriser l’essai.
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