Prévision de la demande : les bénéfices concrets de l’intelligence artificielle [Tribune]
Anticiper la demande est un sujet éminemment stratégique pour tous les secteurs d’activité, qui plus est pour le retail où les volumes de produits et l’étendue des réseaux de distribution sont tels que chaque variation peut avoir un impact immense sur le chiffre d’affaires. Et pour Arnaud Gauthier, président et chief customer officer EMEA de Symphony RetailAI, l’IA confirme ses promesses et est aujourd’hui capable d’apporter une précision sans précédent et des gains très significatifs.
Les challenges de la prévision de la demande
Le monde du retail fait face à trois grands challenges classiques en matière de prévision de la demande : la multiplicité des références et des catégories produit, les problèmes de qualité des données, et la prise en compte des facteurs extérieurs.
Les volumes et la variété des produits représentent la première difficulté pour établir des statistiques et de projections de vente fiables. Au-delà du très grand nombre de données à brasser, les enseignes se heurtent régulièrement à un manque de visibilité sur certaines catégories de produits, notamment tous ceux pour lesquels elles ne disposent pas de modèles de saisonnalité établis ou d’historiques suffisants. L’introduction de nouvelles références est un autre cas classique où la prévision de la demande est au mieux approximative, sinon hasardeuse.
La deuxième grande contrainte tient aux nombreuses interventions manuelles qui entrent dans la gestion des données et les calculs de prévision, et qui posent la question de la qualité des données. En permanence, il est nécessaire d’ajuster, de corriger ou de compléter les données, créant des problèmes d’hétérogénéité et des erreurs inévitables.
Le troisième challenge est lié à la prise en compte des facteurs extérieurs. La météo, la saisonnalité, les évènements tels que les grèves ou encore les réseaux sociaux sont autant de facteurs qui influencent les comportements d’achat des consommateurs, et qui compliquent fortement les calculs de prévision en raison de leur caractère parfois très aléatoire.
Face à ces challenges, l’approche statistique et empirique sur laquelle se fonde traditionnellement la prévision de la demande est limitée par un plafond de verre. L’arrivée à maturité de l’IA change aujourd’hui radicalement la donne et permet de faire un saut qualitatif sans précédent.
Démonstration des tests grandeur nature
L’une des principales forces de l’IA réside dans sa capacité à automatiser le traitement des très grands volumes de données. Dans le contexte de la prévision de la demande pour le retail, la question est notamment la suivante : l’IA peut-elle automatiser le nettoyage des données et la catégorisation des produits ?
Certaines enseignes ont lancé des projets pilotes visant à tester les performances de l’automatisation et de la prévision par l’IA, et ont aujourd’hui suffisamment de recul pour juger concrètement les résultats. L’exemple d’Intermarché est particulièrement probant. Pendant plusieurs mois, l’enseigne a effectué un test en prenant en compte trois années d’historique de données sur un périmètre couvrant 2 entrepôts caractéristiques. L’enseigne a sélectionné pour ce test son entrepôt le plus petit, de type produits surgelés, et son entrepôt le plus gros avec près de 30.000 SKUs. En réunissant des entrepôts différents, le distributeur voulait valider les modèles utilisés en s’assurant qu’ils demeuraient valides et efficaces quel que soit le périmètre utilisé. Au final l’objectif était d’automatiser les prévisions afin d’obtenir des résultats au moins égaux à ceux qui étaient produits avec une méthode statistique classique et mature.
Au-delà des attentes, le test a permis d’atteindre un taux de fiabilité des prévisions de 95%, soit 15 points de mieux que précédemment. Les gains de qualité de prévision ont été constatés sur toutes les rotations d’articles, toutes les tailles d’entrepôt et toutes les catégories de produit. L’IA a même pu identifier des produits répondant à une saisonnalité qui n’avait jamais été détectée auparavant. Elle s’est également montrée beaucoup plus performante pour faire des projections sur plusieurs semaines, et ce en quelques minutes.
Bénéfices concrets
Les performances exceptionnelles de l’IA pour la prévision de la demande se traduisent par des bénéfices tangibles sur l’ensemble de la supply chain, à commencer par l’amélioration des approvisionnements qui entrainent moins de ruptures de produits, moins de surstocks et moins de gaspillage (notamment pour les produits alimentaires). La planification s’en trouve elle aussi améliorée, permettant d’optimiser les capacités de stockage ou encore de réception/expédition.
Des gains de productivité significatifs sont également clairement constatés. L’IA joue pleinement son rôle d’aide à la décision pour les prévisionnistes, tout en libérant du temps qu’ils peuvent consacrer à des tâches à haute valeur ajoutée.
Enfin, les prévisions basées sur l’IA facilitent et améliorent le choix des modèles de promotion. Grâce à la fiabilité et la précision des projections, les simulations et les scénarios permettent de définir les opérations promotionnelles les plus efficaces.
L’IA a aujourd’hui atteint un niveau de maturité et une efficacité tels qu’elle s’impose comme le nouveau modèle de prévision de la demande. Toutes les enseignes qui testent ses performances obtiennent non seulement des niveaux de précision et de fiabilité sans précédent, mais sont également impressionnés par sa capacité à identifier des particularités et des exceptions jusque-là indétectables et inconnues. Avec l’IA, la prévision de la demande devient réellement une science, et tend probablement à devenir une science exacte.