Pricing dynamique et contrat de confiance [Edito]
Sur internet, les e-commerçants changent leurs prix au gré de leurs stocks, des fréquences d'achats et des tarifs de la concurrence. Tout le monde le sait et personne ne dit rien. Sur les marchés, les vendeurs adaptent leurs prix en fonction du lieu, des typologies de clientèles, du niveau de remplissage des étals ou des camionnettes et même des heures (moins cher enfin de matinée… ). Tout le monde le sait et personne ne dit rien. En revanche, sur le carrelage des grandes surfaces, le pricing dynamique serait une hérésie ! Allez comprendre…
Cette pratique est pourtant légale, à condition de respecter la concordance des prix entre les gondoles et les caisses (donc de changer les prix pendant les heures de fermeture) et de ne pas afficher des tarifs différents entre les prospectus et les rayons. Elle est ensuite possible grâce aux étiquettes électroniques. Surtout, à l'heure de la fragmentation des courses, de l'essor du multiformat, et alors que de sérieux problèmes de rentabilité se posent aussi bien du côté de l'industrie que de la distribution, le prix unique affiche ses limites. Il paraît urgent de retravailler son pricing avec une autre approche, pour ne pas dire une autre culture… Les prix de vente pourraient alors varier selon les formats, les fréquences d'achats, les prévisions de vente, les stocks, les heures, les événements locaux, la météo, les cibles prioritaires…
Et pour commencer, arrêtons denier la volatilité des prix. Ce qui revient à oublier qu'un point de vente vit déjà au rythme de ses cadenciers, avec systématiquement plusieurs milliers d'étiquettes qui changent plusieurs fois par mois. Le pricing est donc déjà dynamique ! À la baisse, cette pratique est habituelle et personne ne s'en plaint quand ils'agit de liquider des stocks de produits frais, par exemple. Mais la question est plus épineuses'ils'agit de changer ses tarifs à la hausse, par exemple un jour férié ou un dimanche (mais quel magasin saisonnier n'a jamais ajusté son tarifaire en pleine saison ?). Il revient à chaque point de vente d'analyser l'élasticité au prix des références concernées, puis de naviguer dans un corridor de prix qui est déjà historiquement très vaste en grande distribution (27 % d'écart entre l'enseigne la moins chère et la plus chère !).
Il n'en reste pas moins que tout n'est pas permis. Aux yeux de bien des consommateurs, la grande distribution est le lieu du prix bas. Si elle joue à contre-emploi, en assumant de monter les tarifs, ou pire, en le cachant, les risques sont réels d'offusquer les clients. Car si le pricing dynamique peut aisément se faire en drive ou pour une livraison à domicile, il doit se manier avec précaution en magasin tant, dans l'imaginaire des Français, le rôle du point de vente n'est pas le même. Il n'est donc pas question de renier cette pratique mais de savoir jusqu'où un patron de magasin peut aller. Le commerce n'est pas devenu une simple histoire d'arithmétique mais, à l'inverse, il ne se résume plus à une question de flair oud'intuition avec le crayon sur l'oreille. Il convient de se servir du pricing dynamique tout en ne rompant pas le contrat de confiance avec ses clients. Un difficile mais nécessaire équilibre à trouver.