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Une aide à l'avènement d'une économie plus circulaire
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« Une période de transition de cinq à dix ans sera nécessaire »
Une aide à l'avènement d'une économie plus circulaire
Occasion, location : on parle de plus en plus d'économie circulaire. Beaucoup de marques s'y mettent, pour donner une seconde vie à leurs articles. Mais demain, il sera nécessaire de suivre tout le cycle des vies d'un produit. Et pour cela, le QR Code sera bien utile…
Les marques grand public s'intéressent de plus en plus à la circularité de leurs produits, notamment avec des offres de seconde main et de location. Historiquement cantonnées au textile, ces offres se répandent désormais dans d'autres secteurs, comme l'électronique et l'électroménager. Il faut dire que les avantages sont nombreux. Pour ses propres articles, on peut augmenter considérablement sa marge en réussissant à les vendre neufs, puis à les faire rapporter par le client qui veut s'en séparer, avant de les vendre à nouveau.
Des tests dans le textile
C'est aussi une manière de renforcer la relation avec le client, ou de toucher une nouvelle clientèle, par exemple pour les marques qui font le choix de ne passe restreindre à leurs produits et de proposer aussi ceux de leurs concurrents en seconde main. « L'économie circulaire, c'est une transformation complète de l'entreprise, résume Delphine Lebas, directrice RSE de Petit Bateau. Le client devient aussi votre fournisseur. Et le personnel en magasin n'est plus seulement payé pour vendre des produits, mais aussi pour gérer des retours. »
L'entreprise s'est fixée comme objectif de proposer un tiers de ses produits en seconde main ou en location d'ici à 2030. L'ambition est celle d'une intégration totale de la seconde main au circuit de vente et de logistique. « Le but est que le client puisse acheter neuf ou d'occasion sur le même site et se faire livrer depuis le même entrepôt », précise Delphine Lebas. Pour la location, Petit Bateau s'y essaie avec les vêtements pour bébés, qui s'y prêtent bien puisque les bambins changent très vite de taille.
Toujours dans le textile, Kiabi a fait un choix original en termes de seconde main, celui de ne passe restreindre à sa marque pour aussi proposer des produits concurrents. « Nous voulions faire de nos magasins des points de collecte et de revente multimarques. Nous ne nous sommes pas posé la question de la cannibalisation de nos produits neufs. Nous n'avons pas le choix, car à un moment, il n'y aura plus de matière », lâche Camille Caron, leader RSE de Kiabi. Pour la marque bon marché, c'est aussi une manière de réussir à se positionner sur la seconde main, malgré la faible valeur résiduelle de ses produits et les coûts logistiques importants engendrés parce circuit. Côté location, Kiabi expérimente avec un segment où les vêtements sont par nature éphémères : ceux de grossesse.
Promouvoir la réparabilité
L'électronique grand public et l'électroménager sont aussi des secteurs dans lesquels la circularité a son intérêt. Les produits ont une forte valeur résiduelle et leurs prix neufs souvent élevés incitent également à les faire réparer et entretenir pour ralentir leur obsolescence. C'est d'ailleurs sur la durabilité des produits que le groupe Fnac Darty a souhaité mettre l'accent, dans un secteur de l'électroménager où plus de 50 % des achats sont liés à une panne. Le groupe, qui propose des réparations depuis les années 70, a revu toute sa politique en 2018. « Nous avons classé les marques les unes par rapport aux autres et créé un indice de réparabilité sur une base 1 00 pour orienter les clients vers les produits les plus durables », raconte Vincent Gufflet, directeur services et opérations du groupe Fnac Darty. L'objectif des deux enseignes est d'augmenter la durée de vie des produits de 35 %. Ce qui passe aussi par de la pédagogie auprès des clients après leur achat, car 45 % des réparations sont dues à un défaut d'entretien.
Du côté des industriels, on s'interroge également sur la durabilité. « Nous nous sommes dit que nous avions une légitimité pour réparer nos produits », explique Christophe Elyn, directeur de la gestion des données matériaux chez Seb. « Nous avons annoncé en 20 15 la réparabilité de tous nos produits pendant dix ans, et nous l'avons étendue à quinze ans en 202 1. Pour y arriver, nous avons constitué un ensemble de pièces détachées dans un entrepôt, ainsi qu'un réseau de 6 000 réparateurs agréés dans le monde, dont 200 en France. En 2023, nous allons réparer10 000 produits qui auraient dûêtre jetés », explique-t-il. Le premier canal de revente est le réseau des boutiques du groupe.
Mais que faire des produits qui ne peuvent pas être revendus, parce que leur état est trop mauvais, ou bien parce que cela ne serait pas rentable ? Afin d'éviter leur destruction, Elodie Özen a fondé la start-up Umains. Elle récupère des stocks de produits non alimentaires invendus ou défectueux des enseignes et leur trouve des débouchés auprès d'acteurs de l'économie sociale et solidaire, afin d'éviter leur destruction. La disparition de ces produits encore utilisables est due à trois problèmes, selon Elodie Özen : « Les entreprises savent gérer la vie du produit mais pas sa fin de vie. Elles manquent de connaissances sur les débouchés potentiels de leurs produits. Et elles veulent s'en libérer rapidement, car plus elles stockent longtemps, plus cela leur coûte. »
Un « trou noir »
Si la plupart des participants de la table ronde reconnaissent n'en être qu'au début de leur démarche, un a incontestablement un coup d'avance, puisqu'il a fait de la seconde vie le cœur de son modèle économique : Back Market. La marketplace de produits électroniques reconditionnés, qui a perfectionné pendant des années son approvisionnement et ses capacités de remise en état d'appareils d'occasion, a été volontiers présentée comme un exemple par les autres participants. Mais à présent, elle fait face au défi d'élargir sa gamme pour continuer de c ro î t re, reconnaît Victor de Lambilly, son directeur catalogue et merchandising : « Nous vendons surtout des smartphones et des tablettes. Notre enjeu est de réussir à proposer des produits plus techniques, comme les ordinateurs, les rasoirs ou les appareils photo, qui nécessitent une vraie expertise et des partenariats avec les fabricants. » Reste que le « trou noir », comme ledit un distributeur, se passe après la vente du produit, notamment lorsque l'emballage, avec toutes ses informations, est jeté à la poubelle. Pour tous ces acteurs, le défi commun reste que les standards d'informations - parler un même langage - soient le socle et le moteur de ce nouveau marché qui se dessine et se façonne, notamment dans le cadre des réglementations européenne et nationale.
Un « passeport » du produit
C'est ainsi que GS1 États-Unis mène le consortium Circular Product Data Protocol, qui développe un standard appliqué à la circularité des produits de mode permettant aux professionnels d'accéder aux données nécessaires pour identifier les matières composant un produit, mieux les séparer, les trier et les recycler. « La question est d'avoir une identification perpétuelle d'un produit qui aura plusieurs vies. Nous allons devoir apprendre à suivre tous les produits dans toutes leurs vies. Par exemple, savoir identifier tous les réparateurs agréés par telle ou telle marque », explique Cédric Lecolley, directeur commercial et filières de GS1 France.
Une réglementation européenne encours d'élaboration, le Digital Product Passport (DPP), changera clairement la donne. Les réparateurs, les distributeurs, les consommateurs, en résumé, tous les acteurs d'une filière, devront pouvoir savoir quels sont les composants d'un produit, s'il faut les changer, quand ils ont été changés, etc. Il faudra même identifier des lieux et des personnes qui ont eu une action sur ce produit. Véritable passeport numérique, le DPP concernera un très grand nombre de filières et assurera une traçabilité avec une granularité plus fine, avec par exemple les numéros de lot ou de série. Ce qui, pour l'instant, n'est pas le cas.
« Nous avons une maîtrise de la chaîne de valeur de nos produits, mais pas à l'unicité de l'exemplaire », explique Delphine Lebas. « La sérialisation reste la solution. Mais il faut, par exemple, que le code résiste aux multiples lavages », ajoute un autre participant. Etc'est là où peut intervenir le QR Code augmenté GS1. « À partir du moment où le code est scanné, l'acte est enregistré. On peut digitaliser la vie des produits à chaque opération, comme la livraison, la réparation, etc. Le livre de l'histoire du produit s'écrit au fur et à mesure. Et ça ne marche que si tout le mondeparle le même langage », conclut Cédric Lecolley.
LES ENJEUX
LES ENJEUX
- Se mettre à la seconde main est complexe et coûteux car il faut tout revoir, de la logistique au pricing.
- Mais ces efforts peuvent permettre aux marques d'améliorer leur image, de trouver un nouveau public et d'améliorer leurs marges.
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