Fraîchement lancé en France, Temu veut faire de l’ombre à Shein, Wish et AliExpress
Après avoir fait un carton aux USA, la marketplace spécialisée dans la vente de produits à bas coût fabriqués en Chine se lance dans plusieurs pays d’Europe, dont la France. Sa stratégie : commercialiser des produits ultra low-cost et séduire les consommateurs en les mitraillant de publicités sur les réseaux sociaux.
Lélia de Matharel
\ 12h29
Lélia de Matharel
Shein, Wish et AliExpress ont du souci à se faire. Le site e-commerce et les deux marketplaces spécialisées dans la vente de produits à bas coût « made in China » ont désormais un nouveau concurrent dans l’Hexagone : la place de marché Temu, qui s’est lancée discrètement en Europe courant avril 2023. Le site et l’application sont désormais disponibles en France, mais également en Espagne, en Italie, en Allemagne, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Ils sont encore en version anglaise et l’entreprise n’a pas donné plus d’informations sur leur déploiement dans les langues locales. Le site propose des vêtements, des produits électroniques, des bijoux, des articles de sport, pour la maison...
Cette plateforme a fait un carton aux Etats-Unis depuis son lancement en août 2022. Elle est depuis le mois de novembre en tête des applications mobiles les plus téléchargées du pays, sur Android et Apple. Plus de 20 millions d’Américains l’ont installée sur leur mobile. Cette marketplace est la version internationale de l’application chinoise Pinduoduo, qui permet de faire son shopping en ligne à bas coût, grâce à l’achat groupé de produits. Le nom de Temu (qui se prononce timou) est l’abréviation de la devise du site « Team up, price down », que l'on pourrait traduire par « faites équipes pour baisser les prix » dans la langue de Molière. Cette place de marché connecte directement les fabricants chinois aux consommateurs, coupant les intermédiaires.
Des tarifs qui rasent la moquette
La clef de son succès outre-Atlantique est celle du prix : en période d’inflation et de baisse du pouvoir d’achat, les consommateurs sont attirés par les articles à bas coût. La version européenne de l’application et du site met en valeur ses faibles tarifs, à grand coups de prix barrés. Elle annonce même sur sa page d’accueil des réductions pouvant aller jusqu’à 90%.
Elle pousse également des codes promo de 8, 20 et même 40 euros de réduction pour des paniers respectivement supérieurs à 60, 100 et 150 euros. L’entreprise donne, pour chaque catégorie de produit qu’elle met en avant, le prix de l’article le moins cher qui en fait partie. Elle propose ainsi des chaussures pour femme à partir de… 17 centimes d’euros, comme le montre la capture d’écran ci-dessous.
Mais Temu use également avec talent de la publicité, notamment sur les réseaux sociaux : aux USA, l’entreprise conduit en ce moment plus de 7500 campagnes sur Instagram et Facebook en ciblant différents segments de consommateurs. Une stratégie questionnable à long terme, car les tarifs de la publicité digitale ont beaucoup augmenté ces dernières années. Elle offre également des produits gratuits aux influenceurs qui poussent leurs abonnés à s’inscrire sur sa plateforme. Au sein même de l’application, elle joue sur la peur de louper le train des utilisateurs, la fameuse « fear of missing out ». Elle indique à côté de certains produits le nombre de clients qui les ont achetés, pour pousser l’internaute à dégainer sa carte bleue avant qu’il n’y en ait plus, met en avant un compte à rebours à côté d’une offre de livraison gratuite…
Mais télécharger une application est une chose, en devenir un client régulier en est une autre : pour avoir du succès à long terme, Temu devra satisfaire ses clients. Or de nombreuses marketplaces offrant un large choix de produits, comme Amazon, livrent en une journée. La livraison peut en comparaison prendre une semaine ou plus sur l’application. Sans parler de la qualité des produits dont les prix peuvent descendre sous les 20 centimes d’euros… La compagnie a d’ailleurs bien senti ce risque, puisqu’elle propose aux internautes « d’acheter des produits et des marques en bonne qualité » dans la description Google de son site. Elle pourrait donc faire face aux mêmes écueils que ses concurrents Wish et AliExpress. Autre potentiel frein à son développement, et pas des moindres : l’entreprise devra prouver aux autorités tricolores et européennes que les produits qu’elle commercialise respectent les normes locales et ne mettent pas en danger les consommateurs. En France, le gendarme de la consommation tricolore, la DGCCRF a déréférencé Wish des moteurs de recherches et des magasins d’applications fin 2021 car la plateforme vendait des articles dangereux. Elle n’a refait surface qu’en mars 2023 après avoir réalisé un grand ménage dans son assortiment de produits.
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