De Coopérative U au Slip français, l’arrivée de Shein au BHV provoque un tollé

L’annonce de l’arrivée de Shein au BHV et dans des magasins affiliés Galeries Lafayette détenus par la foncière SGM suscite l’indignation de nombreuses enseignes, marques et fédérations. Tour d’horizon des réactions de la profession.

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De Coopérative U au Slip français, l’arrivée de Shein au BHV provoque un tollé
Après avoir testé le commerce physique via des pop-up stores, Shein veut implanter des espaces permanents au BHV. Les acteurs du commerce s'insurgent.

Après le partenariat avec Pimkie, c’est l’alliance de la foncière SGM avec Shein qui suscite de nombreuses réactions des enseignes, des marques, des fédérations et des élus. SGM a annoncé hier, mercredi 1er octobre 2025, l’intention d’ouvrir des espaces permanents Shein au BHV et dans cinq de ses magasins affiliés Galeries Lafayette.

La première réaction négative a été celle de la tête de réseau : « Le groupe Galeries Lafayette tient à exprimer son profond désaccord avec cette décision au regard du positionnement et des pratiques de cette marque d’ultra fast fashion qui est en contradiction avec l’offre et les valeurs des Galeries Lafayette. Elle est également contraire aux conditions contractuelles d’affiliation qui lient le groupe SGM aux Galeries Lafayette, déclare l’enseigne dans un communiqué de presse. Le groupe a fait part de sa position au groupe SGM et à son président, Frédéric Merlin. Il empêchera la mise en œuvre de cette décision. »

Des marques veulent quitter le BHV

Si les Galeries Lafayette peuvent peut-être empêcher l’arrivée de Shein dans les magasins affiliés, en revanche, elles ne peuvent rien faire concernant le BHV qu’elles ont vendu à SGM il y a deux ans. Des marques vendues au BHV ne se voient pas cohabiter avec Shein. « Cette décision ne correspond pas à nos valeurs ni à ce que nous défendons : une industrie de la mode et de la beauté plus responsable, plus respectueuse des personnes et de la planète, déclare Mathilde Lacombe, co-fondatrice de la marque beauté Aime. Nous ne pouvons pas fermer les yeux. En intégrant Shein, le BHV envoie un signal très négatif à l’ensemble du secteur. Je pense qu’il est de notre responsabilité, en tant que marques, de nous positionner clairement. Avec François Morrier [co-fondateur de la marque], nous souhaitons retirer Aime du BHV. Et j’invite toutes les marques partageant ces convictions à réfléchir à cette décision avec nous. Nos choix collectifs construisent l’avenir de notre industrie. »

Même son de cloche chez Merci Handy. « Nous avons demandé en urgence un rendez-vous pour exprimer notre désaccord et tenter de dissuader ce partenariat, déclare Louis Marty, dirigeant de Merci Handy sur LinkedIn. Même au sein des équipes d’achat, la décision ne semble pas faire l’unanimité. »

Des marques se réjouissent d'avoir quitté le BHV

D’autres marques qui ont décidé de quitter le BHV car leurs factures n’étaient plus payées se réjouissent d’être parties pour ne pas avoir à côtoyer Shein. « Finalement fière d'avoir quitté le BHV cette semaine… », écrit Léa Marie, directrice générale du Slip Français sur Linkedin. Xavier Martin, directeur général de Maison Lejaby, qui vient de retirer ses produits du BHV constate que « le choix est clair de la part de la famille Merlin, SGM Family. Au détriment de la trésorerie de centaines de fournisseurs français qui ne sont plus payés depuis des mois et ne le seront sans doute jamais, faire le buzz à tout prix. Mais qui sont-ils pour tout simplement manquer de respect envers toutes ces entreprises qui se sont démenées pour les accompagner dans la relance de cette enseigne ? Pour tous ces employés payés par les marques en concession qui vont être licenciés ? Comment ont-ils par ailleurs pu croire que les Galeries Lafayette ne réagiraient pas à l’arrivée de Shein dans 5 de leurs magasins en franchise ? Ils n’ont peur de rien et sont prêts à tout. Des mercenaires. Des voyous plutôt. Les tribunaux vont être saturés d’injonctions de payer dans les semaines à venir. J’espère très sincèrement que nos politiques vont réagir. »

Pour l’instant, en l’absence de gouvernement, seule la mairie de Paris a réagi. Nicolas Bonnet Oulaldj, adjoint en charge du commerce, a écrit à la SGM pour demander que la foncière reconsidère le partenariat. 

Pour Dominique Schelcher, président de Coopérative U, ce partenariat est « vraiment l'arbre qui cache la forêt… Ce n'est pas parce qu'on crée une boutique que l'arrière-boutique a changé ». Car si Shein et le BHV annoncent créer 200 emplois en ouvrant six boutiques et « vouloir sauver les centres-villes en déshérence », le patron de Coopérative U pointe les 60 000 emplois perdus dans le commerce physique depuis dix ans : « derrière le faux-nez de quelques façades rutilantes, le risque pour le consommateur et le commerce reste bien réel. »

Les fédérations tirent la sonnette d'alarme

Les fédérations du commerce qui s’étaient déjà insurgées du partenariat Pimkie-Shein dénoncent aussi l’alliance SGM-Shein. « Shein ne peut pas être le sauveur d’un secteur qu’il a contribué à affaiblir. Chaque mètre carré accordé à Shein fragilise ceux qui respectent les règles, affirme l’Alliance du Commerce. L’implantation physique de Shein ne peut être interprétée comme un simple fait commercial. Accueillir cet acteur dans les centres-villes ou au sein de réseaux de distribution revient à lui offrir une forme de reconnaissance, alors même que son fonctionnement est contraire aux efforts de transformation du secteur. »

Pour Marc Lolivier, directeur général de la Fevad, « après l'annonce la semaine dernière du partenariat avec Pimkie, l’arrivée de Shein dans les locaux de deux enseignes françaises iconiques – le BHV et certains magasins des Galeries Lafayette – doit nous alerter. Ce n’est pas un simple partenariat commercial : c’est une stratégie d’implantation agressive. Après avoir saturé l’e-commerce mondial avec des pratiques déloyales, Shein s’attaque désormais au commerce physique. Ne nous y trompons pas : ce qui se joue ici dépasse la mode. Demain, ce seront la beauté, la décoration, la maison, puis d’autres secteurs. Temu en est la preuve. Le danger est systémique. »

Les fédérations appellent les pouvoirs politiques en France et en Europe à agir. « Nous avons déjà connu ce scénario avec l’industrie en laissant filer des pans entiers de production. Les conséquences ont été désastreuses : pertes massives d’emplois, perte de souveraineté, dépendances stratégiques. Nous ne pouvons pas laisser l’histoire se répéter avec le commerce, qui représente 3,6 millions d’emplois en France et plus de 25 millions en Europe. Face à cette situation, chacun doit prendre ses responsabilités et la France et l’Europe doivent agir urgemment pour faire respecter nos règles communes. Ce partenariat est un signal d’alarme. Et si nous ne réagissons pas collectivement et rapidement, demain il sera tout simplement trop tard », conclut Marc Lolivier.

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