Pénalisé par la météo, le barbecue dans l'attente d'une éclaircie
Pénalisé par une météo défavorable au printemps dernier et par l'inflation, le marché du barbecue et de ses équipements a perdu du terrain. Pour les acteurs du segment, l'embellie passe par l'évolution de leurs gammes afin de favoriser son usage tout au long de l'année.
Christian Capitaine
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Christian Capitaine
Les enjeux
- Plombées par une saison printanière pluvieuse, les ventes de barbecues ont encore fléchi l'an passé. Sur le long terme, la dynamique reste positive, portée par un usage qui s'étend tout au long de l'année.
- Le marché du charbon de bois, bien qu'en repli, résiste grâce à la baisse limitée des ventes d'équipements de barbecue qui utilisent ce combustible.
- Affectées aussi par la météo, les gammes de viandes accusent une perte de volumes, même si leur CA résiste grâce à l'inflation.
« En sept ans chez Weber, je n'avais jamais connu une telle situation. » Franck Frogé, directeur général de la filiale française du « fabricant américain, ne mâche pas ses mots pour dépeindre la forte contraction des ventes enregistrée, l'an passé, par le segment des équipements de barbecue sur sa période phare, qui court d'avril à juin. « Il faut dire, ajoute-t-il, qu'à l'instar de tous les segments du jardin, nous avons été plombés par une météo catastrophique… À fin septembre, le marché des barbecues, toutes familles confondues, accusait déjà-1 5% en volume ». « Même si les ventes ont rebondi durant l'automne, jamais la météo n'avait eu un tel impact sur nos marchés durant le printemps », abonde Édouard Delalande, directeur commercial de Campingaz. Avant de pointer un autre facteur : « L'impact de la baisse du pouvoir d'achat des Français, eu égard au contexte inflationniste ».
« Dans un environnement économique difficile, les consommateurs réfléchissent à deux fois avant d'investir dans des solutions qui ne sont pas de première nécessité, reprend Franck Frogé. Mais, heureusement, ceux qui ont acheté se sont fait plaisir. Ils ont été moins regardants sur les prix et ont investi dans des produits durables. Si bien que notre panier moyen a progressé ». Il n'empêche : selon Anne-Sophie Pollet, leader expert décorateur & produits manufacturés de jardin chez Jardiland, le marché, en 2023, a bel et bien ralenti. « Mais il faut reconnaître qu'il a succédé à deux années de ventes post-Covid exceptionnelles pour la catégorie. »
Les chiffres
- -8% : l'évolution du chiffre d'affaires des équipements de barbecues, à 159 M €
- -6,3 % : l'évolution en volume des ventes d'allume-feux et combustibles pour barbecue
Source : GfK
- -19% : l'évolution en volume des viandes gammes été, à 18 907 tonnes
Source : Circana, 2023, HM +SM+proxi +drive
- 120 000 t : la consommation de charbon de bois en France en 2023, à environ -5% vs 2022
- 57 M € : le chiffre d'affaires 2023 des allume-feux et combustibles pour barbecue, à +8,8 % (- 6,3% en volume)
Sources : GfK et fabricants
Disparité des baisses
Par famille de produits, les plus forts reculs, l'an passé, ont concerné les équipements électriques (sur pieds), à - 16 % en valeur, et les barbecues à gaz additionnés aux planchas, à - 12,5 % (avec un prix moyen de vente de 450 € pour les solutions à gaz et de 265 € pour les planchas). Fin septembre, leurs volumes accusaient déjà -21% (CAD à P9) ! Dans cette ère de pouvoir d'achat en berne, il n'est donc pas étonnant que le segment ayant le mieux limité la casse soit celui des barbecues à charbon, les équipements les moins chers de la catégorie (au prix de vente moyen de 120 €), lesquels accusent un repli de « seulement » 5 %. « Le barbecue à charbon, c'est le tronc commun de la catégorie, explique Anne-Sophie Pollet. C'est un indétrônable. Il symbolise l'idée de rassemblement autour d'un repas festif. Et c'est très souvent le premier achat en équipement de barbecue. »
Par canaux de ventes, les grandes surfaces de bricolage se sont détachées, avec, en tête d'affiche, les magasins installés sur les zones de chalandise importantes, au détriment des petits espaces de vente en ruralité, davantage en souffrance. Les GSB sont en effet restées, en 2023, les plus grosses vendeuses de barbecues, avec près d'une vente sur deux, et une baisse de leur CA barbecue limitée à 4 %. Derrière, les hypermarchés (14 %de PDM), les jardineries (17% de PDM) et les GSS couplées aux spécialistes de l'offre barbecue (24 % de PDM) ont affiché des ventes en retrait homogènes, entre - 13 % et -15 %. Malgré ces reculs par rapport à 2022, Franck Frogé reste positif. « Après deux années de pics de consommation en 2020 et 2021, liés à la période Covid, nous restons sur un marché structurellement dynamique, affichant toujours une légère hausse par rapport à 2019. »
Sur ce marché des équipements de barbecues très météo-dépendant, l'année 2024 s'écrit pourtant en pointillés pour les fabricants. « Nos clients distributeurs n'ont que timidement commandé pour la saison qui démarre en février. Ils sont dans l'attentisme et prennent le minimum. En conséquence, ce sont nous, les industriels, qui portons les stocks. Et mécaniquement, notre trésorerie en pâtit », fait savoir Édouard Delalande. Ce que confirme l'un de ses confrères : « Dans ce contexte, nous nous retrouvons avec d'importants stocks sur les bras. Nous n'avions pas anticipé ce ralentissement des achats. Mais heureusement, lorsque nos carnets de commandes seront mieux remplis, nous serons en mesure de livrer nos clients rapidement. »
Les équipements de barbecue font grise mine
Malgré une belle arrière-saison, la catégorie des équipements de barbecue a accusé, en 2023, une baisse sensible de ses ventes. La faute, selon les marques leaders du marché, à un printemps déprimant en termes de ventes. « En sept ans, je n'avais jamais connu un marché en telle difficulté sur la période », révèle Franck Frogé, directeur général France de Weber Stephen. La faute aussi aux arbitrages des Français, qui ont délaissé, dans un contexte d'inflation, les achats « plaisir ». Toutefois, la dynamique des ventes de ce marché reste, sur l'année, bien orientée par rapport à 2019, qui a précédé deux années d'euphorie durant la période Covid. Dans ce tableau grisâtre, les barbecues à charbon limitent la casse, avec une contraction de 5% en valeur.
Compacte et design
La plancha Electric 1 XD de Campingaz est une solution compacte et design, conçue pour répondre aux besoins des consommateurs urbains, en quête de moments de grillades sur leur balcon ou leur terrasse tout au long de l’année.
Gain de temps
Nouveau modèle de la gamme Master-Touch, signé Weber, ce barbecue est doté d’une grille de cuisson de 67 cm. Sa grande surface permet de cuire simultanément le plat principal et les accompagnements.
Des nouveautés plus élaborées
Même si les fabricants sont plus prudents dans le renouvellement de leurs assortiments, leurs nouveautés commencent à s'installer chez les revendeurs. Illustration avec Weber, qui pénètre pour la première fois le marché des planchas à gaz, avec trois modèles de la gamme Weber Slate. « Ce marché, où nous n'étions présents qu'à travers une offre en accessoires, recèle de belles opportunités de développement, indique Franck Frogé. Il est porté par deux leviers : la facilité d'utilisation, avec des solutions intuitives, et la facilité d'entretien ». De son côté, Campingaz, numéro un du segment des planchas à gaz avec près de 25 % de parts de marché détenues, présent sur ce marché depuis 2014, poursuit, cette année, la mise en avant de sa gamme Tw in. Sa particularité : proposer un espace grill/ barbecue en plus de la partie plancha lisse en fonte, conçue et émaillée en France. Ce tour de force du fabricant permet ainsi de livrer deux espaces de cuisson bien distincts, afin de ne pas mélanger les saveurs.
Dans la catégorie des barbecues à gaz, Campingaz met l'accent sur sa collection Select 4 EXS, fabriquée dans son usine en Italie. Équipée également d'un système multicuisson, grâce à son côté plancha et son côté grill, doté du procédé Culinary Modular (il suffit de retirer le centre de la grille pour y insérer un plat à paëlla, une pierre à pizza, un wok…), elle propose un nettoyage facile grâce à sa technologie InstaClean (la cuve se démonte en petites parties pour être passée sous l'eau chaude, puis au lave-vaisselle) et à son système Easy Flow (le tiroir de récupération des graisses est conçu de sorte qu'elles tombent directement dans un petit bac facile à nettoyer). Quant à Weber, il promeut son offre la plus haut de gamme sur ce segment des barbecues à gaz: la collection Summit (brûleur infrarouge, large espace de cuisson, technologie SmartControl, puissant système de brûleurs à haute température Pureblu…) au prix public de 4499 € TTC.
Certes plus confidentielle (7 millions d'euros ventilés), la catégorie des barbecues électriques sur pieds (à ne pas confondre avec les grills pour une utilisation en intérieur), est de plus en plus investie par les fabricants. À l'image de Campingaz, qui lance, en 2024, sa Plancha Electric 1 XD et son barbecue Attitude 2go Electric, des produits électriques, compacts et design, « conçus pour répondre aux besoins des consommateurs urbains », explique le fabricant.
Astérix et Hippopotamus à la rescousse
Dans le sillage d'un marché des barbecues à charbon en repli, les ventes de charbon de bois ont accusé, l'an passé, une baisse estimée à près de 5%. « Bien sûr, la météo du printemps n'a pas joué en notre faveur. Cependant, nous avons réussi à maintenir notre niveau de ventes grâce à un allongement, sur l'année, de la pratique du barbecue en France, témoigne Anne-Mette Soler-My, directrice marketing et communication de la marque Soler. Nos produits restent ainsi plus visibles en jardinerie et en GSB, et ce, durant les douze mois ».
Et nul doute que ceux de Soler le seront encore plus cette année : l'industriel français, qui produit chaque année 50 000 tonnes de charbon de bois, lance, en 2024, une gamme sous licence Astérix, baptisée Charbon de bois Gaulois, en version briquettes (trois heures de braise) et gros morceaux (une heure trente de braise). « Avec ce nouveau packaging ludique, l'objectif est de réveiller le marché des GSA durant le printemps, précise Anne-Mette Soler-My. Si en mars, avril et mai, les ventes ne sont pas bonnes, la saison sera ratée, car le rayon sera ensuite remplacé par celui des fournitures scolaires ». Enfin, chez Soler toujours, on se félicite d'avoir décroché, en 2023, un nouveau marché, celui de la chaîne de restauration Hippopotamus. « Nous sommes désormais leur unique fournisseur en charbon de bois pour la cuisson de leurs aliments à la braise, se félicite ainsi la directrice marketing et communication. Leur volonté était de se fournir exclusivement en produits français. »
Charbon et allume-feux à la peine
Pénalisé par la météo pluvieuse d'avril et de mai, le marché du charbon de bois accuse, en 2023, une baisse de ses volumes estimée à près de 5 % (son volume industrie a pesé près de 110 000 tonnes). Une tendance se renforce du côté des consommateurs: ils utilisent leurs équipements de barbecue sur une plus longue période au cours de l'année, et plus uniquement durant les mois ensoleillés du printemps et de l'été. «Cela nous permet d'étendre nos ventes sur davantage de mois et de ne plus être dépendants de la saisonnalité », commente un fabricant leader du secteur. Sur le segment des allume-feux, l'effet de marques a joué son plein, avec une croissance valeur de près de 9%, pour un repli des volumes de plus de 6 %.
Sous licenceLe fabricant français Soler lance, en grande distribution, une gamme de charbon de bois sous la licence Astérix, pour « réveiller et dynamiser le rayon ».Végétale
Harris innove, cette année, avec cette gamme d’allume-feux en laine de bois et cire. Sa particularité : elle est 100% végétale et certifiée FSC.
Indissociables du charbon de bois, les allume-feux ont également vu leurs ventes en volume reculer de plus 6% l'an passé. « Le fait notoire est que, sur notre marché, les consommateurs se tournent de plus en plus vers les marques de fabricants, observe Carole Doche Lemoine, directrice marketing de Harris-Briochin. Ils font preuve d'une vraie considération pour l'expertise ». Conséquence logique de cette prime à la qualité : le chiffre d'affaires du secteur, certes dopé par l'inflation, a progressé de plus de 8% par rapport à 2022. Et, à l'instar de la tendance observée dans le charbon de bois, de forts reports d'achats y ont été réalisés en septembre et octobre, compensant ainsi la morosité des ventes lors du printemps dernier.
Trois moteurs de croissance sont à l'œuvre sur le marché des allume-feux, selon Harris : l'efficacité des produits, leur praticité d'usage (via, notamment, la revente de solutions prédécoupées) et leur naturalité. C'est pour ces raisons que, chez le fabricant français, l'accent sera encore mis, cette année, sur la commercialisation de sa gamme de rouleaux en laine de bois FSC à base de fibres de bois naturelles et de cire 100% végétale. Notons, enfin, que le vaste marché du rayon feu reste dominé, en GSA, par les solutions solides (57 % de sa valeur), suivies des allume-feux gel (15 %), des allumettes (10%), des nettoyants (10 %) et des bois/bûches (8 %), selon des données NielsenIQ (HM-SM/ proxi/drive, en CAM à P9 2023).
La viande se prend aux Jeux
Ingrédient phare de la cuisson au barbecue, le marché de la viande fraîche a affiché, l'an passé, un contraste saisissant entre ses dynamiques volume et valeur. «Le recul volume, déjà à l'œuvre en2022, s'est poursuivi avec-5,4 %, constate Stéphanie Cabagnols, cheffe de produits chez Socopa, tandis qu'en parallèle, le marché s'est valorisé de 6,9 % sous l'effet de l'inflation. » S'agissant de ses gammes été, « elles ont souffert, reprend-elle, puisqu'elles ont affiché une décroissance de 19 % en volume sur le périmètre P4-P9 2023 ».
Plus en détail, ses trois catégories de produits emblématiques, les grillades, les brochettes et les plateaux, ont accusé un repli homogène de leurs volumes, proche des 19 %, pénalisées « par la mauvaise météo et le contexte inflationniste », poursuit la cheffe de produits de Socopa. Enfin, sur le segment spécifique des saucisses, une même dynamique de repli a été observée, avec des ventes en retrait de 4,2 % sur l'ensemble de l'année 2023, pour une croissance valeur de 10,4 %.
Les gammes d'été affectées par la mauvaise météo
Sur le total « viandes fraîches », après-4,8% en 2022, le recul s'est poursuivi l'an passé, avec un marché à -5,4 % en volume. S'agissant des gammes été, elles ont accusé, sur la même période, un fort repli de leurs ventes en volume, alors que la croissance de leur chiffre d'affaires a été soutenue mécaniquement par l'inflation. « Cette décroissance s'explique par la mauvaise météo et le contexte inflationniste », explique-t-on chez Socopa. Tous les segments sont en fort recul, les brochettes, les grillades, comme les plateaux. Les saucisses limitent la casse, avec un retrait des volumes de 4,2%. Par canal de distribution, les hypers ressortent comme celui qui a le plus souffert, et du fait de son poids dominant, comme celui pénalisant le plus le marché, avec un recul de -7,1 % en volume. À l'opposé, le drive est celui qui s'en est le mieux sorti.
Label rougeBigard met en avant sa gamme de chipolatas aux herbes de Provence label Rouge, un label « dépriorisé par les magasins » dans un contexte de repli des ventes de 13,8% en 2023Tapas
Socopa se met aux tapas avec ces petites brochettes de haché de porc « savoureuses et rapides à cuire ».
100% françaisesPour « une cuisson simple au barbecue », Le Gaulois lance sa gamme Le Match des Saveurs, composée de cuisses de poulet déjà découpées, marinées (trois saveurs) et 100% françaises.
Côté innovations pour 2024, les gammes été proposées en rayons par les fabricants seront aux couleurs de l'événement phare de cette période : les Jeux olympiques et paralympiques de Paris. Incarnation de cette tendance, la marque Socopa, portée par sa campagne merchandising « Tous Champions de barbecue », lance notamment une édition spéciale été 2024 de saucisses, baptisée Saveurs des 5 continents. « Notre ambition n'a pas varié : elle consiste à accompagner le consommateur en lui proposant des produits gourmands, originaux et accessibles dans ce contexte de baisse des budgets consacrés à la viande », ajoute Stéphanie Cabagnols. Avant de conclure : « En tant que leader des gammes été, nous fondons de bons espoirs sur les nouveautés que nous dévoilons. Et croisons les doigts pour que l'été soit ensoleillé ! »
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