Gozoki, le champion des produits de terroir haut de gamme
L’entreprise, qui a fait ses débuts il y a près de trente-cinq ans à l’Agropole d’Agen, possède aujourd’hui 16 usines en France et a fait des produits du terroir de qualité son créneau. Portrait d’un groupe aussi discret qu’ambitieux.
Marie Cadoux
\ 11h00
Marie Cadoux
Les marques de fabrique du groupe
- Cofondé et dirigé par Yann Maus, l’industriel du Sud-Ouest, connu pour sa marque Maison Briau et sa gamme de plats cuisinés de la mer, s’est construit à coups de rachats successifs.
- Près de trente-cinq ans après ses débuts, Gozoki multiplie les projets en misant sur l’acquisition de PME spécialisées dans les produits de terroir haut de gamme.
- Pour garantir la qualité de ses produits mais aussi la maîtrise de ses approvisionnements – en circuit court si possible –, Gozoki se tourne de plus en plus vers l’amont agricole.
C’est « un entrepreneur de talent » disent les uns, un « hyperactif », pensent les autres. Sans doute est-il un peu des deux. Aussi discret qu’ambitieux, l’homme en question, Yann Maus, 54 ans, est – aux côtés de Christophe Widcoq – le cofondateur et président du groupe agroalimentaire Gozoki. Un groupe tout aussi discret que son fondateur qui ne possède pas de site internet, seulement une page sur le réseau professionnel LinkedIn pour les postes à pourvoir. Mais les amateurs de brandade de morue connaissent forcément Maison Briau, l’une des marques fortes de l’entreprise.
L’histoire de Gozoki est étroitement associée à celle de l’Agropole d’Agen. « On a fait l’ouverture », rappelle Yann Maus. C’est en 1989, sous l’impulsion de Jean François-Poncet, alors président du conseil général de Lot-et-Garonne, que voit le jour l’Agropole, à Estillac, à 5 kilomètres d’Agen. Dans un département dominé par les productions agricoles, l’enjeu était de développer une industrie agroalimentaire et de valoriser les productions du territoire. C’est au sein de cette structure, avec un CAP de cuisine et à peine 10 000 euros en poche, que Yann Maus crée Le Magicien vert. Un spécialiste des plats cuisinés sous vide (25 millions d’euros de CA et 150 salariés), revendu en 1998 au groupe britannique Perkins Food.
Les chiffres
- 400 M € : Le chiffre d’affaires en 2023
- 1 200 salariés
- 16 usines, dont 7 en Nouvelle-Aquitaine
- 7 piscicultures
Source : Gozoki
Trente-cinq ans plus tard, le groupe pèse 400 millions d’euros de chiffre d’affaires, emploie 1 200 personnes et compte des usines partout en France, de la Loire-Atlantique au Pays basque, en passant par la Gironde, l’Hérault, les Landes, l’Aveyron, la Creuse et le Lot-et-Garonne. Son créneau ? Des produits de terroir à l’identité régionale affirmée et haut de gamme. Au sein du groupe Gozoki, on trouve donc Maison Briau, mais aussi les marques Maison Tino, Pêcheries basques, L’atelier Collet, Cœur d’Aveyron, Miguelgorry, La Marqueze, Pâtisserie des Comtes de la Marche, Gironde Spécialités, Sectal, Traiteur du Val de Cère…
Développer des filières
Depuis ses débuts, Gozoki est resté fidèle à l’Agropole d’Agen, où sont toujours implantés son siège social et trois de ses 16 usines : Maison Briau, Ebaki, site de transformation de viande repris au groupement des Mousquetaires en 2020 (alors Saviel) et converti en usine de découpe et de fumage de truites, et enfin Végécroc. Ce site, qui s’étend sur 10 000 m², a été construit en 2018 et a fait l’objet d’un investissement de 30 millions d’euros. « Il s’agit de notre légumerie qui transforme près de 15 000 tonnes de légumes frais par an. Ils entrent dans la fabrication de nos plats cuisinés », explique Yann Maus. Devenu leader de la brandade de morue, Maison Briau a étendu sa capacité de production sur un second lieu, au Technopole d’Agen-Garonne situé à Sainte-Colombe-en-Bruilhois. Ce site de 11 000 m² a représenté un investissement de 36 millions d’euros. « En l’espace de trois ans, nous avons investi 80 millions d’euros », résume Yann Maus.
Et pas question d’en rester là. « Le sujet de la valeur ajoutée dans l’agriculture ne se réglera pas sans une industrie agroalimentaire forte avec des acteurs capables de fabriquer des produits locaux et de développer des filières. C’est ce qui anime le groupe », dit le patron emblématique du Sud-Ouest.
Des marques régionales premium
- Maison Briau (plats cuisinés de la mer)
- Maison Tino (plats cuisinés)
- L’atelier Collet (paella et couscous au rayon frais emballé)
- Cœur d’Aveyron (truffade et aligot)
- Miguelgorry (gâteau basque)
- La Marquèze (tourtes et pastis landais)
- Pâtisserie des Comtes de la Marche (moelleux aux noisettes)
- Pêcheries basques (truite fumée et plats cuisinés de la mer)
- Sectal (pâtisserie)
- Traiteur du Val de Cère (plats cuisinés en format familial)
Une conviction qui prend la forme de nouveaux projets. Tourné vers l’amont, Gozoki est, en effet, en train de développer trois exploitations, l’une dans le Gers pour l’élevage de bœufs de race Aubrac, une autre en Lot-et-Garonne pour l’élevage de porcs de plein air et une troisième dans les Landes pour la production de légumes. « Ces exploitations ont une dimension expérimentale. Ce qui nous intéresse est d’établir le modèle économique en circuit court et de le dupliquer auprès d’agriculteurs partenaires. Dans le Gers, l’exploitation d’élevage bovin se situe seulement à vingt minutes de l’abattoir d’Auch », insiste Yann Maus. Ces trois exploitations devraient répondre à environ 15 % des besoins en matières premières du groupe Gozoki. Les premiers bœufs sortiront de l’élevage du Gers au milieu de l’année 2025.
Rachats successifs
C’est cette démarche d’intégration qui a conduit il y a quelques années Gozoki à reprendre sept piscicultures de truite (quatre dans les Pyrénées et trois en Galice, de l’autre côté de la frontière), faisant du groupe lot-et-garonnais le numéro deux français de la truite derrière le landais Aqualande. Sa capacité de production est de 6 000 tonnes par an. « On peut cuisiner du saumon élevé à 4 000 kilomètres de chez nous. Nous, on préfère la truite nourrie sans farine issue de la pêche minotière et élevée dans des bassins à faible densité », poursuit Yann Maus. Les poissons sont transformés dans les deux ateliers du Lot-et Garonne, ou fumés sous la marque Pêcheries basques.
« Cette année, nous projetons d’acquérir deux ou trois sites de produits haut de gamme à l’identité régionale reconnue. »
Yann Maus, cofondateur et président du groupe Gozoki
Hormis quatre usines construites de toutes pièces autour d’Agen, Gozoki s’est développé à coups de rachats successifs. Et là encore, pas question d’en rester là. « Nous tablons sur deux à trois nouvelles acquisitions cette année », assure Yann Maus. Le contexte économique est porteur. « Avec le relèvement des taux d’intérêt, beaucoup de PME ont un niveau d’endettement de plus en plus fort et ont besoin de se renforcer en fonds propres pour se développer. Pour d’autres PME créées après-guerre, la problématique de la transmission commence à se poser », expliquait il y a quelques semaines à LSA Perrine Bismuth, cofondatrice aux côtés de Laurent Plantier et de Paul Moutinho de la société d’investissement FrenchFoodCapital. L’entrepreneur du Sud-Ouest est assurément sur les rangs…