Le Millénaire doit intensifier ses connexions au nord-est de Paris

Une fois ses accès routiers, au métro et au tram finalisés en fin d'année, la deuxième urgence pour le Millénaire sera de consolider sa notoriété auprès des Parisiens, qui peinent encore à franchir le périphérique. La Fnac n'a pas attendu, elle quitte le centre.

Partager

Imaginez un très beau smartphone... qui capterait pourtant mal son réseau. Ce n'est peut-être pas l'image la plus courante pour un centre commercial, mais elle résume la situation du Millénaire. Nul ne conteste l'élégance, ni la puissance à terme de ce pôle de 56 000 m² « branché » depuis plus de seize mois par Klépierre et Icade à Aubervilliers, au nord-est de Paris. Mais des bruits courraient sur ses sérieux problèmes de « connexions ». À la fois physiques, avec des travaux limitant ses accès. Et commerciales, faute de franchir la « barrière psychologique » du périphérique pour rallier la clientèle parisienne et de se défaire des préjugés sur la banlieue de Seine-Saint-Denis.

« Fréquentation décevante »

Là-dessus, court-circuit ! La Fnac annonce le 29 août son projet de fermeture du magasin du Millénaire (2 093 m²) pour « fréquentation décevante » ! Les gestionnaires rétorquent en annonçant un rythme annuel de 6 millions de visiteurs, « en croissance régulière ». Faisant briller des performances en hausse de 50% pour Zara, de 44% pour H et M et de 10% pour Carrefour sur la période juin-juillet 2012 (par rapport à 2011). « Avec des chiffres d'affaires au mètre carré dans les meilleurs standards de ces grandes enseignes. » Tandis que la Fnac est renvoyée à la baisse de régime de son business model.... D'autres enseignes menacent-elles de se « désactiver » ? Ou partagent-elles la confiance de Klépierre-Icade ? LSA leur a posé la question. Et leurs réponses sont très nuancées.

La première urgence évoquée par toutes est de finaliser les voies de desserte du centre. « Les travaux d'accès, rue Madeleine-Vionnet, seront terminés en fin d'année, annonce Sandrine Quesnel, directrice marketing et communication de Klépierre. De même, ceux du tramway T3 sur les boulevards des Maréchaux. L'une des deux nouvelles stations de métro, Front populaire, prolongeant la ligne 12, ouvrira enfin. Elle permettra de rejoindre le centre à pied ». Première bouffée d'oxygène. Mais pas la seule.

Les « beaux chiffres de l'été » d'enseignes de renom mis en avant par les gestionnaires du centre seraient-ils partiaux ? Non. De plus modestes magasins confirment une embellie sur juin-juillet-août. Tels l'indépendant Marmon Sports et Eram. Ou Catherine Lebreton, la créatrice de Fascination, une boutique de mode éthique et équitable, qui annonce des progressions de plus de 30% en juin-juillet.

Défaut de campagne

« Les soldes ont fait découvrir et apprécier le centre à de nouveaux clients, qui sont ensuite revenus », estime Mila Dembele, la directrice du magasin NewYorker (+ 15 % en juillet). Il est vrai que, une fois qu'on y est allé, le centre semble apprécié. Gratifié d'une note de 7,5/10 et recommandé à leurs amis par la moitié des visiteurs, selon une étude TNS Sofres en avril-mai.

Encore faut-il connaître le centre. Ce qui pointe son autre principal écueil : les défauts de sa campagne de lancement. « Cette idée de vendre le concept de " shopping autour de l'eau " sur des affiches où l'on avait omis la mention... " centre commercial " était beaucoup trop intellectuelle, analyse une commerçante. Il faut davantage aller chercher le client chez lui ! ». Dont acte. Les actions sur le terrain ont été révisées pour mieux « incarner » l'agrément du centre. Avec l'opération Familles au bord de l'eau, en juillet-août, offrant jeux de détente et des activités sportives sur 500 m2 de pelouse. Et la poursuite de la campagne d'affichage dans le métro jusqu'en fin d'année, sur les lignes 7, 12, 13 et 14.

Car l'autre limite du centre est bien celle de ne rayonner guère plus loin que les XVIIIe et XIXe arrondissements. Rendant sa première clientèle un peu plus « populaire » qu'attendu. Ce qui expliquerait l'engouement autour des soldes. Ainsi qu'une attente en opérations prix, satisfaite par la distribution de 225 000 chéquiers anniversaire en mai-juin.

Nul doute qu'une ouverture le dimanche pourrait « ramener du Parisien », selon le mot d'une boutiquière. « La demande est en cours d'instruction à la préfecture de Seine-Saint-Denis » précise-t-on chez Klépierre.

Savoir assumer les risques

Mais cela suffira-t-il à lancer le Millénaire ? « C'est un beau centre, certes, mais quelles enseignes bluffantes a-t-il pour faire se déplacer les gens de très loin ? », interroge un expert. « Comme bien des centres dessinés il y a dix ans, le Millénaire se trouve désynchronisé des évolutions brutales de la consommation survenues depuis, souligne JuanManuel Torralbo, fondateur de l'agence Le Bon Mix ! Agency. Il va devoir s'adapter à son époque, trouver les nouvelles façons de faire rêver des clients blasés. » Et vite. Car dans un mois ouvre So Ouest, à Levallois-Perret (53 000 m2). Et au printemps 2013, le Nouveau Beaugrenelle dans le XVe arrondissement. Pendant que « les directeurs de réseaux coupent, ferment, et ne peuvent plus attendre des années pour qu'un magasin marche ! » Un locataire de renom rappellant qu'il peut résilier son bail 3, 6, 10 à la première échéance des trois ans.

Reste qu'un certain nombre d'enseignes, finalement constitutives de la force d'attraction du Millénaire, croient en son succès à terme et restent solidaire des gestionnaires. « Nous nous sommes embarqués en connaissance de cause, sachant qu'il ne fallait pas s'attendre à des miracles. Et assumons ces risques, admet Christophe Mariani, directeur commercial de Darjeeling. Nos équipes sont mobilisées pour réussir. »

Vers un avenir radieux ?

« Toys ' R ' Us a fait une superbe ouverture en avril 2011, et nous croyons, sans être utopistes, à la destinée de notre enseigne, elle-même une destination, dans ce centre qui finira par s'installer dans le temps » appuie Gaël Jamin, directeur des opérations. « Les centres mettaient autrefois trois ans pour atteindre leur rythme de croisière, rappelle Jean-Michel Silberstein, délégué général du Conseil national des centres commerciaux. C'est aujourd'hui cinq ans. Ce sera peut-être plus pour le Millénaire, le temps que sa zone de chalandise primaire se densifie. Mais huit, neuf millions de visiteurs par an et plus, il les atteindra un jour. »

Les chiffres

56 000 m² de commerces, soit 140 boutiques et restaurants Plus de 1 million d'habitants à moins de trente minutes Un million de véhicules par jour sur le périphérique parisien 2 800 places de parking HQE Commerce et Breeam Very Good (certifications du centre)

Source : Klépierre-Icade

 

 

La fréquentation du Millénaire est sur un rythme annuel de 6 millions de visiteurs, en croissance régulière. [...] L'annonce de la fermeture de la Fnac est à remettre en perspective avec la situation spécifique de l'enseigne. 

KLÉPIERRE-ICADE (LES GESTIONNAIRES), COMMUNIQUÉ DU 30 AOÛT

 

BILLETMillénium ou Millionnaire ?

En le baptisant le Millénaire, les concepteurs du centre ont voulu en faire une « marque de destination » puissante. Mais les noms échappent parfois à leurs créateurs par les méandres de l'inconscient. Des clients et même certains commerçants parlent du centre le « Millénium ». On entend aussi le « Millionnaire ». Flatteuses confusions ! Si Millénium est la traduction anglaise de « millénaire », elle évoque surtout la célèbre saga policière suédoise au succès mondial. Tout comme Millionnaire sonne la richesse. Gloire, fortune... l'inconscient collectif veut-il signifier par ces lapsus sa confiance dans la future réussite d'un centre.... aujourd'hui en devenir ? Aussi richement détourné, et insconsciemment prédestiné, ce nom est finalement bien trouvé ! D. B.

 

Ses écueils

  • Des accès par la route et les transports en commun toujours en chantier. - La « barrière psychologique » du périphérique pour faire venir les Parisiens. - La défiance sur l'image « banlieue » d'Aubervilliers et de la Seine-Saint-Denis.
  • L'absence de cinémas.
  • Une communication sur le centre trop « désincarnée » à son démarrage.

 

Son potentiel

  • Un « bel écrin » à l'architecture et aux abords soignés, apprécié des visiteurs.
  • Un contenu d'enseignes diversifié adapté à la mixité de cible albertivillarienne et parisienne.
  • L'émergence à terme d'un vaste quartier d'affaires et de logements desservi par le tram et le métro.

 

Abonnés

LSA Databoard

Retrouvez les indicateurs de la consommation et du retail pour suivre les évolutions de vos secteurs.

Je découvre

Sujets associés

NEWSLETTER Quotidienne

Nos journalistes sélectionnent pour vous les articles essentiels de votre secteur.

Votre demande d’inscription a bien été prise en compte.

Votre email est traité par notre titre de presse qui selon le titre appartient, à une des sociétés suivantes...

Votre email est traité par notre titre de presse qui selon le titre appartient, à une des sociétés suivantes du : Groupe Moniteur Nanterre B 403 080 823, IPD Nanterre 490 727 633, Groupe Industrie Service Info (GISI) Nanterre 442 233 417. Cette société ou toutes sociétés du Groupe Infopro Digital pourront l'utiliser afin de vous proposer pour leur compte ou celui de leurs clients, des produits et/ou services utiles à vos activités professionnelles. Pour exercer vos droits, vous y opposer ou pour en savoir plus : Charte des données personnelles.

LES ÉVÉNEMENTS

Tous les événements

Les formations LSA CONSO

Toutes les formations

LES SERVICES DE LSA CONSO

Trouvez les entreprises de la conso qui recrutent des talents

Thélem assurances

Assistant commercial (F/H)

Thélem assurances - 03/09/2025 - CDI - CHECY

+ 550 offres d’emploi

Tout voir
Proposé par
LSA