Grande distribution : les marques de biscuits se livrent une concurrence sans merci
Les volumes ont beau stagner, la concurrence s’exacerbe du fait de l’appétence de marques très motivées venues de la confiserie ou de pays voisins.
Armand Chauvel
\ 16h00
Armand Chauvel
Un acheteur de biscuits de 2005, de retour dans le rayon aujourd’hui, ne reconnaîtrait pas ses petits. Avec 5 kg par an et par habitant, les Français restent de gros consommateurs, mais les cartes du rayon ont été rebattues. « Le marché, où nous sommes l’unique offre 100 % fabriquée en France, a encore gagné en attractivité. Cependant, les barrières d’entrée sont telles que pratiquement seules les grandes marques d’autres catégories peuvent s’y inviter », constate Cédric Lunel, le directeur marketing de St Michel (St Michel et Bonne Maman), numéro trois derrière Mondelez et Ferrero.
Ainsi, depuis 2017 et le lancement par Ferrero de Nutella B-ready, suivi de Nutella Biscuits en 2019, la confiserie voit dans la biscuiterie un relais de croissance stratégique. Preuve en est l’importance prise par le chocolatier Milka dans le portefeuille biscuitier de Mondelez. « Si Lu demeure emblématique du goûter, avec une présence dans près de 8 foyers sur 10, Milka figure déjà parmi les cinq premières marques du marché en valeur. Notre campagne 2025 associe du reste biscuit et chocolat pour créer des synergies entre les deux catégories, une approche qui s’avère payante avec une demande en forte augmentation », explique Marion Thouveny, directrice marketing de Lu France.
Nutella et Ferrero, les fers de lance
Des tablettes de chocolat avec des inserts de biscuit ou des biscuits enrobés illustrent cette évolution du marché. Chez Ferrero, Nutella (4,6 points de PDM valeur) et Kinder (3,1 pts) sont, grâce au même genre d’hybridation, les fers de lance de la croissance devant ses marques plus traditionnelles comme (Delacre, 2,1 pts) ou Delichoc (0,9 pts). Entre ses six déclinaisons, Cards, CereAlé, Duo, Tronky, Crunchy Cookies et Kinderini, Kinder déploie ses biscuits en rangs serrés. Usage principalement visé : le goûter, à peu près un quart des occasions de consommation.
Étant donné cette évolution, la marque française de chocolat Merveilles du Monde emboîte le pas à Ferrero et à Milka. « Avec 30 % de notoriété et 7 millions de tablettes vendues depuis 2023, nous avons aujourd’hui la légitimité pour proposer aux familles des biscuits qui allient plaisir et responsabilité à l’heure du goûter », déclare Amélie Coulombe, cofondatrice de Krokola, repreneur de la marque en 2021. Concrètement, ce sont deux recettes intégrant du chocolat en forme d’animaux de la savane et sans huile de palme fabriquées en France, dans l’Ain, en vente chez Carrefour, Auchan, E. Leclerc et Monoprix. Une extension de gamme est prévue en 2026.
Une jungle gourmande
Dans la jungle du biscuit, Merveilles du Monde devra compter avec le poids de MDD encore très dominantes (32,9 % de PDM), malgré un recul de 2 points. Un repli qui redonne de l’air aux marques nationales alors que certaines MDD, portées par l’inflation, projetaient d’atteindre les 40 %. Le leader, Lu, en tire logiquement parti. « Le rayon des biscuits céréaliers a une offre large qui tend à se recentrer sur les piliers du rayon qui tirent la croissance, ce qui valorise nos biscuits iconiques », commente Marion Thouveny. Ainsi, sur douze mois glissants à fin juin, Lu Petit Écolier et Lu Granola ont vu leurs ventes progresser en valeur de 18,5 % et 11,9 %. Des performances toutefois à nuancer, les tensions commerciales de 2024 ayant réduit leur distribution.
« Nous sommes convaincus du grand potentiel de nos produits qui pourraient être encore plus visibles en rayon compte tenu de leurs performances. Tous les indicateurs sont au vert pour continuer à booster ensemble la catégorie. »
Clotilde Paquier, directrice marketing boulangerie Europe de l’Ouest de Barilla
D’autres marques, en particulier transalpines, s’intéressent à ce marché gourmand. Lancés en 2020, les Baiocchi, Abbracci et Canestrini de Mulino Bianco (Barilla), le numéro un italien de la biscuiterie, ont atteint à CAM P6 et en tous circuits les 25 millions d’euros de ventes, à + 16 % (NielsenIQ). Les Baiocchi, des sablés fourrés à la crème, mènent la danse.
« Nous avons fait le choix de nous concentrer sur des références ciblées, à fort potentiel et qui répondent aux attentes du consommateur français, lequel semble nous apprécier puisque nous avons une croissance à deux chiffres chaque année », déclare Clotilde Paquier, directrice marketing boulangerie Europe de l’Ouest de Barilla. Un assortiment plus large est proposé au rayon produits du monde, mais par l’intermédiaire d’un distributeur spécialisé.
Retour d’un pilier du rayon
Ayant intensifié son internationalisation en 2023, un autre italien, Bauli, spécialiste du panettone et du pandoro, s’intéresse aussi au rayon biscuits. « Certaines de nos références sont disponibles en produits du monde, d’autres lors d’opérations spécifiques. Lancés en 2025, nos biscuits best-sellers en Italie, Bucaneve et Dorè, plaisent énormément, de sorte que nous visons une double implantation », confie Marion Allain, directrice générale de Bauli France.
À l’initiative de Bur Distribution, maison mère de la marque d’épicerie fine Éric Bur, Fingers Cadbury, une marque de Mondelez qui avait quitté le marché français, est de retour depuis avril. « Il y avait une opportunité pour relancer les Fingers en France et nous l’avons saisie auprès d’un intermédiaire anglais », explique Ferréol de Bony, le PDG.
La gamme (car elle inclut deux recettes nouvelles chez nous, caramel beurre salé et orange), sera probablement répartie entre les rayons biscuits et produits du monde. En tout état de cause, compte tenu de la stagnation des volumes et du plafond atteint par les MDD, la concurrence ne peut que s’intensifier entre biscuitiers comme St Michel, boulangers comme Mulino Bianco ou confiseurs comme Ferrero.
Les chiffres
- + 2,2 % : l’évolution du CA de la biscuiterie sucrée (hors moelleux pâtisserie industrielle), à 2,93 Mrds €, -0,1 % en volume
Source : NielsenIQ, origine fabricants, CAM à P6 2025,tous circuits
Le goûter en grande forme
Chiffre d’affaires des segments de la biscuiterie sucrée, en M €, évolution en valeur et en volume vs A-1, en %
Source : NielsenIQ, origine fabricants, CAM à P6 2025, tous circuits
Les MDD perdent du terrain
Part de marché en valeur des principaux acteurs de la biscuiterie sucrée (hors moelleux pâtisserie industrielle), en %, et évolution vs A-1, en pts
Source : NielsenIQ, origine fabricants, CAM à P6 2025, tous circuits
Pistacchio
Les petits biscuits fourrés italiens de Mulino Bianco (Barilla) poursuivent leur avancée avec une nouvelle saveur pistache. PVI : 2,99€ les six portions de trois biscuits
Come-back
Pour que les Français continuent à se mordre les doigts de plaisir, Bur Distribution ramène en France les Fingers Cadbury, dont cette nouvelle recette orange. PVI : 3,29 € (3,09 € la recette traditionnelle)
Rugissement
La célèbre marque de tablettes de chocolat rugit au rayon biscuits avec deux références, dont ces tartelettes nappées de pâte à tartiner. PVI :2,95€les 180 g
Flocon
Autre italien dans les produits du monde, Bauli mise beaucoup sur son Bucaneve, un sablé en forme de flocon stylisé avec incrustations de sucre. PVI : 1,60 € les 150 g
Indémodable
Les piliers du rayon, comme ce Petit Écolier Lu au chocolat au lait continuent à surperformer. PVI : 1,99 € les deux portions de six
Croquants
Associant le chocolat et la noix de coco, ces Petits Carrés confirment le savoir-faire de Bonne Maman (St Michel) en biscuiterie traditionnelle. PVI : 2,48 € les 16
Cet article est issu de l'édition du 18 septembre 2025
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