Les produits traiteur renforcent leur ancrage local
Pour séduire le consommateur, les marques revisitent des recettes traditionnelles, privilégiant un sourcing et des labels locaux.
Marie Nicot
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Marie Nicot
Chiffres
- + 4,1 % : l’évolution en valeur du traiteur frais LS, à 5,6 Mrds €
Source : Iri, CAM à oct. 2018, tous circuits
- +37,2% : l’évolution en valeur du traiteur bio, à 154,6 m €, soit une part de marché de 2,8 %
Source : Iri, CAM à octobre 2018, tous circuits
- +25% : l’évolution annuelle du traiteur végétal d’ici à 2020
Source : Xerfi
«La société Giraudet lance en février une gamme de sauces fraîches pour pâtes élaborée avec des ingrédients bio ou issus d’appellation d’origine protégée. Les six recettes conçues par le chef Michel Porfido possèdent une texture riche pour bien napper les pâtes, sans sucre ni eau ajoutés. » Carole Doire, responsable marketing et communication de la PME basée à Bourg-en-Bresse (Ain), s’attaque à un segment sinistré du traiteur frais libre-service. Estimé à 5,9 millions d’euros, le marché des sauces fraîches chute de 3,5 % (source : Nielsen d’après fabricants, CAM à P10 2018). Une situation alarmante alors que le traiteur frais libre-service est, lui, en forme, à + 4,1 % en valeur (source : Iri, CAM à octobre 2018, tous circuits).
Égayer la banalité
Avec ses nouvelles sauces fraîches en pot de verre de 250 g pour une consommation familiale, Giraudet opte pour une stratégie qui lui a réussi sur le marché en panne de la quenelle : rester fidèle à une fabrication traditionnelle et de qualité, afficher son ancrage régional et innover. Ainsi la PME fabrique ses quenelles avec du blé dur, ne rajoute pas d’eau et privilégie des ingrédients français et de qualité, bio ou AOP, comme le comté dix-huit mois d’affinage ou le piment d’Espelette. Le cuisinier Michel Porfido a réveillé un produit banalisé avec des recettes en phase avec les attentes actuelles : quenelles au quinoa bio, à la châtaigne bio, miniquenelles au pesto à poêler... Résultat : le chiffre d’affaires 2018 de Giraudet progresse de 5 % (14,3 millions d’euros). Malgré les difficultés d’approvisionnement en beurre et œufs labellisés AB, la marque tire la quenelle vers le haut. Les dernières données Nielsen d’après fabricants, CAM à P10 2018, révèlent une hausse en valeur de 0,9 %, en dépit d’une baisse en volume de 0,3 %.
À l’instar de Giraudet, les marques capitalisent sur leur ancrage régional. Elles revisitent les formules pour les mettre au goût du jour. « Les consommateurs âgés de 20 à 40 ans souhaitent retrouver des recettes vintages : choucroute, osso-buco, purée de grand-mère..., assure Sylvain Zaffaroni, fondateur du cabinet Happyfeed. C’est un retour aux sources qui rassure car ces produits inscrits dans le terroir évoquent les circuits courts, la traçabilité, le soutien aux producteurs français... On cherche donc le drapeau tricolore sur le packaging. »
Après le prix, l’origine
Au rayon traiteur, rassurer sur le sourcing n’est pas un vain mot. Le scandale de la viande de cheval en 2013 reste en mémoire. Aujourd’hui, le consommateur veut favoriser en plus un approvisionnement local pour préserver la planète et les revenus des agriculteurs français. Selon un sondage BVA-Presse régionale de la vie quotidienne en juillet 2018, la provenance du produit est la troisième préoccupation des Français lors de l’achat après le prix et la date de péremption. Et 43 % assurent privilégier systématiquement l’origine France. Des chiffres qui n’étonnent guère David Garbous, directeur marketing de Fleury Michon : « Nous avons inscrit l’origine des viandes des plats préparés bien avant le 1er janvier 2017, à laquelle s’ajoute l’indication sur la fabrication française. Cela conforte dans leur choix les 50 % de foyers qui consomment des plats préparés. »
Le 26 décembre 2018, un décret a autorisé les fabricants à poursuivre le dispositif d’étiquetage de l’origine de la viande et du lait présents dans les plats cuisinés. Seuls ceux transformés avec 100 % de viande française ou 100 % de lait français pourront porter l’étiquette « produit d’origine française ». Les industriels ont anticipé la législation. Lancées en avril 2018, deux références de la gamme premium Secrets de cuisine de Marie (groupe LDC) affichent le logo « bœuf né, élevé, préparé en France » pour le Fondant de bœuf sauce à la basquaise, et « volaille née, élevée et préparée en France » pour le Filet de poulet sauce au paprika fumé.
De plus, les labels régionaux (AOP, AOC...) sont populaires. Alexandre Japy, fondateur de La Brouette qui propose 14 recettes de plats cuisinés à base de légumes, l’a bien compris avec son Écrasé de pommes de terre au beurre AOP des Charentes. La start-up créée en 2016 garantit que « les légumes de saison sont issus à 90 % de terroirs français » et « cuits à basse température pour les préserver ».
Innovation et subtilité
Actualiser de vieilles recettes et coller un drapeau tricolore ne suffisent pas. L’innovation exige de la subtilité. « Il faut concevoir des recettes allégées et en portions plus réduites que celles de nos anciens, prévient Sylvain Zaffaroni. Elles sont aussi moins carnées. On n’imagine plus faire un tabac avec un plat à base de cuisses de grenouilles. » En témoigne la société Vitafrais (Organic Alliance), qui a lancé en novembre 2018 une offre sous la marque Pronatura végétal gourmand. Présentes au rayon traiteur frais des magasins bio, ces références valorisent des matières premières disparues de nos menus : le chanvre et le lupin qui, malgré leur fort apport en protéines et vitamines, ont été détrônés par le soja. Pronatura végétal gourmand les incorpore avec d’autres légumineuses, céréales et aromates dans des purées (Délices de petits pois citron-basilic...), des steaks végétaux (Gourmets de haricots noirs quinoa et poivrons...)... Bien connue des végétariens et des végans, la marque se positionne sur le traiteur végétal, qui devrait croître de 25 % par an d’ici à 2020, selon le cabinet Xerfi. En sortant de l’oubli d’anciennes graines, Pronatura végétal gourmand réconcilie ainsi les anciens et les modernes.
Les salades tirent le marché
Chiffre d’affaires, en M €, des différents segments du rayon traiteur, et évolution, en %
En phase avec les attentes de snacking sain, les salades repas, qui ont su se renouveler, sont les plus dynamiques du marché traiteur.
So french
Avec ce logo d’un Hexagone bleu-blanc-rouge et la mention poulet origine France, Fleury Michon souligne le côté frenchy de sa Cuisse de poulet rôti pommes de terre grenailles.
AOP et Brouette
La Brouette propose une gamme de 14 références de plats préparés à base de légumes issus à 90 % du terroir français, sans additifs et avec une DLC de dix jours minimum.
Au chanvre
C’est avec la volonté de relancer des cultures locales que Pronatura végétal gourmand (Vitafrais) propose des produits au chanvre et au lupin, sources de vitamines.
New quenelle
Giraudet reste fidèle aux recettes d’origine (farine de blé dur, comté AOP...) pour des quenelles fraîches haut de gamme et bio. Certaines références sont revues : au quinoa, miniquenelles au pesto à poêler...
Secrets de marie
La gamme Secrets de cuisine de Marie remet au goût du jour des recettes classiques tel le Fondant de boeuf sauce à la basquaise, issu d’un « bovin né, élevé, préparé en France ».
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