Drives: optimiser la préparation des commandes
L’heure est à l’organisation au cordeau des rayonset des espaces de préparation pour les commandes des drives. S’y ajoute une couche technologique pour gagner en efficacité lors de la formation des commandes, gourmandes en personnel.
Morgan Leclerc
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Morgan Leclerc
- Améliorer le circuit de préparation des commandes, séquence par séquence, pour limiter les coûts.
- Organiser la collecte en conséquence, via des outils technologiques et un agencement adapté, voire mettre en place des solutions mécanisées ou robotisées.
La préparation de commandes est le nerf de la guerre où se gagnent ou se perdent les points de rentabilité. Gros consommateur de personnel pour le picking, quand les employés vont chercher les produits en rayon ou dans l’entrepôt dédié, le drive dispose d’une palette de modèles s’adaptant à une volumétrie des commandes très variable. Parmi les leviers, le matériel joue son rôle, avec des technologies qui se sont améliorées. Au point que des nouveaux salariés peuvent être opérationnels en une demi-journée, après une formation sur le terrain.
Dans un entrepôt drive que nous avons visité, un système go-to-light, développé par Pickeos et reposant sur des leds multicolores, s’allumait devant chaque rayon pour indiquer au préparateur où il devait se rendre, en optimisant déplacement et logique de collecte. Parfait pour les débutants qui ne connaissent pas l’agencement des lieux, avec une couleur attribuée à chacun (parmi 26 couleurs possibles). Dans le même ordre, le pick-to-light, associé aux étiquettes électroniques qui clignotent pour signaler le bon emplacement en magasin, permettrait 10 % de gain de temps sur la collecte pure. À l’éclatement, le put-to-light est aussi un atout, en faisant clignoter le bac où disposer le produit, plutôt qu’un simple numéro de bac renseigné. L’équipement individuel est aussi clé, avec des PDA sur lesquels les applications métiers doivent être intégrées : flashage, scan, affichage des produits. Avec ce type d’outils déployés depuis 2019, Intermarché assure avoir gagné 20 % de productivité.
Stocks dédiés ou entrepôts ?
Chez Système U, le principe mis en place dans 80 % du parc repose sur la ramasse globale : le driver récupère les produits en rayons pour une vingtaine de commandes, et se rend ensuite dans la zone d’éclatement pour individualiser le tout. « Ce modèle est préconisé à partir de 100 commandes hebdomadaires. En dessous, nous effectuons de la préparation monocommande. Cela nous permet de gagner en productivité et de réduire la pénibilité du travail de nos équipes », assure Emmanuel Hugon, associé Système U à Sisteron (04), chargé du drive. Un driver expérimenté récupérera plus de 120 produits à l’heure, naviguant de rayon en rayon. Mais dès que la volumétrie des commandes s’envole, des systèmes sont possibles pour limiter les trajets et manipulations, et la masse salariale. Sachant qu’un drive réalisant plus d’un million d’euros de chiffre d’affaires occupe environ dix salariés.
Pour les grosses unités, les drives accolés, dotés d’un stock d’un millier – voire plus – de références, font gagner en efficacité. Ce principe testé chez Intermarché, depuis l’an dernier, a entraîné des gains de chiffre d’affaires de 30 à 100 %, chasse aux ruptures oblige. Chez U, environ 20 % des magasins travaillent avec un stock dédié, et la volonté de développer le drive accolé est affichée. Une piste à explorer avant de se lancer vers des projets plus importants et plus onéreux que sont les drives solos. « Si vous travaillez avec un entrepôt, l’implantation interne est déterminante, avec l’optimisation de chaque geste. Aujourd’hui, préparer une commande est plus simple avec les scanettes par rapport aux débuts, façon papier et stylo », décrit un patron de drive. Pour limiter le nombre de pas d’un préparateur, la méthode ABC est aussi de mise dans les entrepôts pour agencer les stocks. Les 20 % de références, qui représentent 80 % des sorties, sont installées dans les premiers mètres du rayon (groupe A) pour être vite récupérées. Le groupe B (15 % des sorties et 30 % des références) est un peu plus loin, idem pour le groupe C (5 % des sorties et 50 % des références les moins vendues). La professionnalisation de l’outil drive est le premier levier à actionner pour les sites ayant un nombre de commandes raisonnable. Puis, dès que les volumes progressent, l’évolution est nécessaire, sinon salutaire pour le confort de circulation et pour le compte d’exploitation.
Loïc Guilhaumou, adhérent Intermarché à Champigny-sur-Marne (94), qui participe au Star Drive (lire p. 58), explique : « Le drive pèse 1,3 million d’euros de chiffre d’affaires chez moi, avec 250 000 € de salaires. Avec le Star Drive, le but est de réduire ce poste de 30 %. En novembre 2019, j’avais 1 170 commandes, en novembre 2020, 1 700. Jamais je n’aurais pu produire autant sans cet outil. » Produire : le mot est clair. Et partagé. « Je dis aux patrons de magasin : vous n’êtes plus des retailers, mais des industriels, et le produit à sortir c’est une commande client », souligne Vincent Levy, directeur e-commerce et cross-canal de Cora France. Pour cette enseigne, avec son assortiment de plus de 35 000 références et qui s’appuie sur du picking en point de vente, le principe est celui de la ramasse volumique et de l’éclatement.
Passer du m2 au m3
La difficulté de l’exercice tient aussi au redimensionnement des outils, et à la capacité d’anticipation tant le circuit recrute des clients en permanence. « Nous mécanisons de plus en plus nos entrepôts, et l’enjeu c’est de passer du mètre carré au mètre cube. Un site non mécanisé peut le devenir rapidement. Car il faut préparer dès aujourd’hui la demande qu’on y aura d’ici deux à trois ans », indique Mourad Bensadik, directeur supply chain e-commerce de Carrefour France, alors qu’il nous fait visiter la plate-forme de préparation automatisée (PPC) du Plessis-Pâté (91), où les bacs de stockage se dressent jusqu’à 12 mètres de haut. En plus de ces quatre énormes plates-formes de préparation en France, le distributeur a mis sur pied une quinzaine de sites drives hybrides (dédiés à la préparation drive ou via du microfulfillment, c’est-à-dire un modèle réduit de préparation robotisé accolé à des hypermarchés). Une piste à ne pas négliger. Pour Grégory Boulanger, managing director d’Accenture : « Dans un magasin, les frais de personnel varient de 9 à 11 % du CA. Dans un modèle de picking magasin, ce ratio dépasse les 15 %. Un modèle automatisé le ramène à 11-12 %. Être rentable est possible à condition de mettre le bon niveau d’automatisation et d’avoir les volumes. »
D’autant plus que la démocratisation des technologies fait baisser les coûts, les rendant plus attractives. Mais de nombreux spécialistes restent réalistes quant aux développements. « Au début, on voyait des cash back sur dix-douze ans. Aujourd’hui, on regarde ce qui est faisable en termes de microfulfillment, qui peut être intéressant en termes de productivité. Mais il faut arriver à un retour sur investissement assez court, pour rechanger de modèle quatre ou cinq ans plus tard si la technologie est obsolète », poursuit Vincent Levy, de Cora France. Un discours qui ressemble à celui d’Emmanuel Hugon, de Système U. « Nous avons encore beaucoup de business à faire avec de la préparation magasin avant d’aller vers des projets onéreux, comme les Star Drive ou les PPC Carrefour. Nous travaillons actuellement pour trouver notre meilleur modèle de plate-forme de préparation mutualisée. Ce sont des technologies dont les coûts baissent vite, et nous permettent d’envisager des projets viables d’ici un à deux ans. » De la rentabilité oui, mais pas à n’importe quel prix.

- L’équipement en scanettes et PDA dotés d’applications métiers et maison
- Le système pick-to-light pour faciliter le repérage des références en rayon
- La ramasse volumique et l’éclatement pour les magasins à fort potentiel
- L’automatisation/robotisation pour les drives importants (put-to-light et robots goods-to-man)
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