Glaces: comment réussir la saison 2022?
Après des résultats en recul durant l’été 2021, industriels et distributeurs spécialistes se sont mis en ordre de marche pour ne pas rater la saison 2022. Au menu : des investissements, des innovations de rupture et des mises en avant en magasins.
Camille Harel
\ 13h00
Camille Harel
• 1,02 Mrd € : le CA des surgelés sucrés lors de l’été 2021, à - 7 % vs 2020 (- 9,7 % en volume)
Source : Iri, P4 à P9 2021, tous circuits GMS
L’été est évidemment une période cruciale pour les acteurs des glaces. En 2021, les ventes d’avril à septembre (P4-P9) ont représenté 70,8 % en valeur sur le total de l’année. Si les stratégies sont tous les ans bien définies afin d’enregistrer de la croissance, les intervenants n’ont pas toutes les cartes en main. Car s’il y a bien un paramètre qu’ils ne commandent pas, c’est la météo, décisive pour une saison prospère. Un constat qui s’est vérifié l’été dernier, avec des températures, selon Weathernews, inférieures d’1,7° en juillet et de 2,8° en août aux normales saisonnières. Situation responsable, entre autres, de la baisse du marché, en recul de 7 % en valeur et de 9,7 % en volume selon Iri, à 1 milliard d’euros de chiffre d’affaires sur P4-P9 2021.
Des résultats qui sont cependant à relativiser après une année 2020 exceptionnelle, liée au contexte sanitaire favorable à la GMS en raison de la fermeture de la RHF. « L’année 2021 est moins bonne que la précédente mais le chiffre d’affaires est tout de même plus élevé qu’en 2019 », tempère Pierre Van Marrewijk, directeur commercial et marketing chez Froneri. Car indéniablement, les consommateurs sont au rendez-vous : 88 % des Français ont acheté des glaces en 2021, selon Kantar.
Innovations ciblées
Pour dynamiser la saison estivale 2022, les intervenants ont donc activé différents leviers, dont les plus importants sont l’innovation et la R & D. Froneri, qui proposait déjà des bâtonnets avec sa marque Côte d’Or, arrive sur deux nouveaux segments : les cônes et les pots. L’industriel lance également une référence additionnelle de bâtonnets Nuii (3,2 millions de foyers acheteurs, dont 575 000 recrutés en 2021) avec New York Cookies & Cream.
De son côté, Unilever, le leader des glaces avec plus de 30 % de part de marché, continue d’activer sa plate-forme Magnum. Après le succès des bâtonnets Magnum Billionaire, sortis en 2021, « la meilleure innovation Magnum de tous les temps avec un chiffre d’affaires de 10,8 millions d’euros », souligne Jérôme Nouveau, le directeur de la catégorie glaces, la marque innove avec Magnum Remix. Il s’agit d’un bâtonnet trempé deux fois : une première en entier dans un chocolat et une seconde fois à moitié dans un autre. « Cette innovation, qui sera fabriquée en Italie et en Allemagne, a nécessité une adaptation industrielle de nos lignes existantes », poursuit Jérôme Nouveau. Autre nouveauté, les pots Sundae de Ben & Jerry’s, qui associent deux textures (une crème glacée surmontée d’une crème fouettée glacée). Unilever a choisi de fait de capitaliser sur un nombre plus restreint d’innovations. « Nous avons décidé de concentrer nos efforts sur quelques projets. 90 % du chiffre d’affaires des innovations provient de deux ou trois nouveautés, inutile donc de les multiplier », ajoute Jérôme Nouveau.
Déclinaisons de marques
Enfin, Ferrero, qui s’était lancé l’an passé dans les glaces, a décidé de se renforcer sur le marché suite au triomphe de ses bâtonnets Rocher et Raffaello (29 millions d’euros de ventes en 2021, dont 24 millions de mars à août). « Nous avons comme stratégie de développer nos marques fortes sur les marchés plaisir afin de fournir une expérience complète à nos consommateurs. Nous sommes arrivés sur le segment des biscuits il y a quatre ans et nous représentons déjà 15 % du marché. Nous souhaitons avoir une stratégie similaire sur les glaces », explique Loïc Lallier, directeur trade marketing et business développement chez Ferrero France. Ainsi, l’industriel a décidé de décliner sa célèbre marque Kinder Bueno en cônes glacés. Une gamme qui n’en est cependant pas à son coup d’essai. En effet, en 2018, Ferrero et Unilever s’étaient associés pour créer une collection Kinder Ice Cream (bâtonnets, sandwich, cônes et minicônes), fabriquée par Unilever. Malgré le succès (18 millions d’euros de vente en 2018), le partenariat avait pris fin en 2020. « Cette nouvelle gamme est différente car nous sommes désormais fabricants de nos produits glacés (Ferrero a pris une participation majoritaire dans l’outil industriel espagnol Ice Cream Factory Comaker, NDLR). Nous allons apporter la même expérience qu’une barre de confiserie Kinder avec une glace noisette, un disque chocolat-noisette et une gaufrette croustillante », détaille Loïc Lallier.
Autre levier pour accompagner ces lancements, les industriels n’hésitent pas à mettre la main au porte-monnaie pour communiquer. Froneri annonce multiplier par deux le budget média de la marque Extrême et par deux et demi celui de Nuii, tout comme Côte d’Or. « Au total, chez Froneri, il s’agit d’une hausse de budget média de 70 % pour 2022 », se félicite Pierre Van Marrewijk. Ferrero va, quant à lui, fortement soutenir le lancement de Kinder en point de vente avec de la PLV dès Pâques, qui s’ajoutera à une stratégie d’extravisibilité pour l’été. Par ailleurs, certains ont choisi de faire sortir les glaces du rayon. Froneri va inaugurer en mai, pour la première fois, un pop-up store dédié à la marque Extrême, rue de Turenne dans le 3e arrondissement de Paris, pour une durée d’un mois. Quant à Unilever, il se déploie sur un nouveau canal de distribution. Le groupe, qui avait testé la livraison à domicile avec Deliveroo et Uber Eats pour Magnum et Ben & Jerry’s, pérennise cette expérience. « Nous avons gagné 10 millions d’euros sur ce canal et nous souhaitons progresser de 50 % par an. Il s’agit d’un partenariat sur le long terme avec de nombreux projets », confie Jérôme Nouveau.
Démonstrations de force
Des ambitions de taille, qui vont de pair avec celles des enseignes spécialisées. Chez le leader de la distribution de produits surgelés Picard, dont les glaces représentent 13 % des ventes en volume de l’été 2021, le travail se fait tous azimuts : clean label, plaisir et gourmandise, bien-être… « Nous voulons montrer notre force à travers les glaces. Nous avons notre marque de fabrique et nos clients viennent pour ça », insiste Delphine Courtier, directrice marketing, achats et R & D chez Picard. L’enseigne indique avoir prévu une vingtaine d’innovations et une dizaine de rénovations pour cet été. Elle sort, entre autres, une troisième référence de glace végane au lait de coco et innove avec un produit ludique à destination des enfants, en cocréation avec une jeune consommatrice. Enfin, Picard va mener des opérations transversales avec des semaines thématiques, et réorganise ses magasins en ajoutant, dans la mesure du possible, un septième bac dans ses linéaires.
De son côté, Thiriet, le numéro deux du marché, mène une stratégie propre. « La totalité de notre offre de glaces est produite dans nos ateliers de fabrication. À la différence des autres acteurs du marché, nous menons un travail d’innovation, qui engendre des adaptations industrielles », explique Charlène Simermann, responsable marketing et offre chez Thiriet. Le distributeur, qui s’est engagé à rénover l’ensemble de ses gammes de glaces d’ici à quatre ans, s’est concentré sur les bâtonnets, après avoir travaillé les cornets et les pots ces deux dernières années. « Nous avons défini une collection de bâtonnets avec trois offres : accessible, cœur de gamme avec une forme singulière de parenthèse, et prestige 1902 en format individuel rupturiste de type finger », détaille Charlène Simermann. Pour cette saison, l’enseigne comptera un total de 264 références de glaces, dont 50 innovations.
Chez l’ensemble des intervenants, tous les pions sont donc alignés pour que la saison soit couronnée de succès. Sauf si dame Nature décide encore une fois d’être capricieuse et de venir brouiller la donne.
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