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Pour la sixième année consécutive, LSA a recueilli les projections d’une vingtaine d’experts du retail sur les enjeux de 2021. Ils décrivent un commerce en pleine transformation. Aujourd'hui, Frédéric Boublil, fondateur du cabinet Boublil Conseil.
La Rédaction
\ 08h30
La Rédaction
La recomposition du secteur s’amplifie et s’accélère. Confrontés à une sélection darwinienne, certains distributeurs restent en sursis. D’autres, en revanche, préparent leur rebond, voire leur renaissance : la crise sanitaire leur a donné l’occasion d’expérimenter une nouvelle façon de penser le commerce, et surtout de le vivre. Voici comment…
1) Le parc de magasins : sortir du cadre et penser à long terme
- Diversifier ses modèles de commercialisation : c’est le cas de Décathlon, qui enrichit sa palette de canaux de vente traditionnels (points de vente, site marchand…), en opérant comme fournisseur d’enseignes alimentaires (en France, chez Franprix, en Belgique, dans un Carrefour), et comme concessionnaire (avec un shop in shop à Auchan Orléans). Ces nouveaux modes opératoires lui permettent de se développer rapidement en maîtrisant les investissements, et en réduisant le risque financier : ces initiatives sont moins consommatrices de capex et peuvent être arrêtées plus facilement si elles s’avèrent non concluantes.
- Préempter les futures zones chaudes du commerce, en particulier avec des formats compacts. La proximité est structurellement plébiscitée par les consommateurs. De plus, le rapport à la mobilité et à la ville évolue durablement. C’est donc le moment pour les enseignes de réfléchir à une évolution à long terme de leur empreinte sur le territoire. Les formats compacts, font partie des solutions de redéploiement : ils sont facilement localisables dans les zones de flux, et ils ne nécessitent pas d’autorisation d’exploitation commerciale (CDAC). Jadis insuffisamment performants car bridés par une offre trop courte, ils bénéficient d’une nouvelle attractivité, à condition de proposer aux clients l’accès à toute la gamme - via le drive / les comptoirs. Ceci suppose de maîtriser la chaine omnicanale et ses aspects logistiques et informatiques. En termes de concept, cela signifie unifier le meilleur du monde digital (l’offre, le prix), avec celui, plus expérientiel et plus stimulant, du physique. Ainsi se comprennent l’initiative récente de Castorama dans le centre de Lille, ou d’Ikéa à Paris.
- Enfin, troisième initiative commerciale structurante, s’étendre sur des marchés adjacents, et en particulier l’occasion (un marché de plus de 7Mds€) ou l’économie du partage. Des pure players, comme Vinted et Back Market progressent régulièrement et figurent déjà parmi les sites préférés des français (6ème et 12ème selon Fox Intelligence). Les enseignes de distribution physique, elles, abordent l’occasion de façon plus ou moins offensive : ainsi, Carrefour et Cora ont ouvert leurs premiers concepts en sous-traitant l’exploitation à un spécialiste ; la startup Patatam initie des partenariats avec des enseignes de vêtement (Kiabi, Gémo) et avec Auchan ; de son côté, E.Leclerc, qui dispose déjà de 40 points de vente Leclerc Occasion, a intégré l’activité pour mieux maîtriser son développement, en terme de vitesse et de performance.
2) Le fonctionnement : gérer l’équilibre entre l’autonomisation des équipes et la rigueur des process
Bien sûr, la qualité d’exécution repose sur des process rigoureux et huilés. Pour des enseignes comme Costco, Lidl ou Amazon, c’est même un des piliers de leur performance. Pour les autres, attention toutefois à ne construire ces process qu’à l’aune de la rigueur et de la méticulosité. Les process doivent plus que jamais être pensés pour venir en support de l’intelligence humaine - individuelle et collective -. D’une part, l’intelligence apporte ce supplément d’âme indispensable pour sublimer l’expérience client. D’autre part, elle permet, mieux que n’importe quel process, de gérer des situations non anticipables. Or, les attentes clients sont toujours plus élevées et les imprévus, toujours plus fréquents.
A titre d’illustration, les magasins qui, pendant la crise sanitaire, ont le mieux absorbé les pics de demande en drive se sont appuyés sur des équipes terrain engagées, et avec le niveau d’autonomie approprié. Cette autonomisation locale a permis de prendre un ensemble de microdécisions pragmatiques et orientées client, en conformité avec les règles du siège. In fine, cela se voit dans le CA et dans le NPS. Et ce n’est pas qu’une question de gouvernance : parmi les enseignes qui se sont illustrées dans ce domaine, on retrouve aussi bien des indépendants (ex. Intermarché), que des intégrés (ex. Brico Dépôt).
3) Les actifs : développer la ressource la plus précieuse = la matière grise
- La crise sanitaire a fini de convaincre l’ensemble de la profession du besoin indéfectible de digitalisation. Pour certaines enseignes, les 2 mois de confinement ont eu plus d’impact que les 2 dernières années de transformation digitale ! Le succès de la digitalisation repose bien sûr dans les outils et les systèmes - et donc dans les capex / opex associés. Mais la différence se fait ailleurs : les plus avancés en digital ne sont pas systématiquement les plus dépensiers ; ce sont les mieux organisés, les plus volontaristes et les plus compétents.
- Au-delà de cet aspect, la chasse aux compétences rares s’intensifie. Dans un univers voisin, Google choisit de mieux rémunérer certains ingénieurs en IA que des cadres dirigeants, pourtant mieux positionnés dans l’organisation. Plus près de chez nous, Carrefour souhaite donner un souffle nouveau à son marché frais trad. Il vient pour cela de recruter son directeur de marché dans une startup. Ce type de mouvement sera amené à se développer car tout collectif s’enrichit grâce au métissage de différentes formes de matières grises.
- Car l’enjeu le plus critique réside dans la rétention de cette matière grise, et dans la capacité à faire travailler ensemble des intelligences complémentaires, depuis l’incubation jusqu’au déploiement. L’histoire du drive est typique d’un leadership qui n’a pas été continu de bout en bout : le drive a été conceptualisé par 2 entrepreneurs du commerce. Deux à trois années plus tard, il a été prototypé au sein d’Auchan (à Leers, probablement à l’initiative d’un chef de secteur). Aujourd’hui, c’est Leclerc qui est leader en parts de marché ! C’est un peu comme si l’inventeur d’un vaccin ne bénéficiait pas de sa commercialisation…
4) La mission : redonner au métier de commerçant ses lettres de noblesse
- Cela passe d’abord par une meilleure valorisation des collaborateurs. Le contexte du premier confinement a permis aux équipes terrain de prendre conscience de l’importance de leur métier pour l’ensemble de la société. Et pour prendre un peu de recul par rapport au contexte sanitaire, certains dirigeants ont invité leurs équipes à réfléchir collectivement à l’impact de la Crise sur les métiers du commerce. C’est dans cet esprit que le président de DCM Jennyfer a fait intervenir un philosophe : l’occasion de réaliser que derrière une crise, émergent des opportunités de réinvention. Et que dans un tel contexte, certains savoir-être seront particulièrement valorisés professionnellement : par exemple l’intuition (ex détecter les signaux faibles, décrypter l’indicible), la créativité, la capacité à prendre des risques et à sortir de sa zone de confort.
- Côté consommateurs, leur opinion par rapport au commerce a évolué favorablement : de nombreuses enseignes, notamment alimentaires, ont d’ailleurs progressé dans le classement des entreprises préférées des Français. Surtout, une part croissante de la population a aussi réalisé qu’en se rendant dans des lieux de vente, on se rend aussi dans un lieu de vie.
- Cette crise a aussi permis de resserrer le dialogue entre pouvoirs publics (Etat, collectivités) et distributeurs, et d’illustrer le rôle de la distribution comme amortisseur des inégalités sociales, comme créateur de liant, comme catalyseur de vie dans les territoires.
En conclusion
La mission du commerçant dépasse donc, et de loin, le cadre transactionnel. C’est pour cela que la pérennité du secteur ne sera pas remise en cause : pas parce que les entreprises sont « too big too fail » (trop gros pour faire faillite), mais parce qu’elles sont essentielles à la société, et parce que les pouvoirs publics l’ont parfaitement intégré.
C’est aussi pour cela que de nombreux distributeurs ont encore un potentiel conséquent de croissance et de valorisation. Charge à leurs dirigeants de donner des impulsions audacieuses, et de séduire les investisseurs, grâce à des projets d’entreprise inspirants, nécessitant parfois de dépasser le seul périmètre marchand.
Frédéric Boublil, fondateur du cabinet Boublil Conseil (boublil-conseil.fr), accompagne marques et enseignes de distribution sur l’ensemble de leurs défis stratégiques. Auparavant, Frédéric a occupé des responsabilités opérationnelles chez Auchan et Lagardère Duty Free, et a été Directeur de la Stratégie du Groupe Vivarte.
Frédéric est par ailleurs contributeur du Mercator, ouvrage marketing de référence du groupe HEC. Il a récemment publié l’ouvrage « Distribution : les nouvelles stratégies gagnantes ».
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